Deltafan a écrit : ↑mar. sept. 22, 2020 12:30 am
akulax a écrit : ↑mar. sept. 22, 2020 12:13 am
Seul le nucléaire est actuellement une source d’énergie du bon ordre de grandeur pour une production massive d’hydrogène (mais pas éternellement : la durée de vie du nucléaire actuel, à base de fission d’uranium, n’est guère que de un siècle et demi, alors qu’il ne représente que 5% de l’approvisionnement énergétique mondial, et la multiplication par 100 ou 1000 de cette quotité implique le recours à d’autres filières, dont la surgénération).
(...)
bref, autant dire que cela ne verra jamais le jour car en entrant dans une période de contraction économique occasionnée par la décrue du pétrole, les choix de dépenses publiques seront assez rapidement cornéliens …
Et avec des réacteurs à fusion genre ITER (s'ils fonctionnent un jour) ?
les centrales actuelles ne savent « brûler » que de l’Uranium 235, seul isotope fissile de l’uranium et qui ne constitue « que » 0,7% de l’uranium terrestre (le reste est de l’uranium 238). La fission est « l’éclatement », suite à l’absorption d’un neutron qui le rend instable, d’un gros noyau en deux noyaux plus petits, avec émissions de plusieurs neutrons et de rayons gamma. L’énergie est contenue dans la vitesse des particules qui résultent de cette fission, et dans les rayons gamma.
L’Uranium 235 – un des isotopes de l’uranium – est peu abondant dans la nature sous forme exploitable (il y en a beaucoup dans l’eau de mer, mais à une concentration très faible). Avec la technologie utilisée dans les centrales actuellement en service, le nucléaire dispose de ressources qui sont du même ordre de grandeur que les réserves de pétrole, mais guère plus.
Mais il n’y a pas qu’une seule énergie nucléaire. Une autre filière, « durable » celle-là, permettrait de contourner ce problème : la surgénération, qui désigne une réaction produisant, dans un premier temps, plus de matériau fissile qu’elle n’en consomme. Cela s’obtient en utilisant des éléments dits « fertiles », tels que l’Uranium 238 ou le Thorium 232 (nous aurions alors quelques millénaires devant nous). Un atome « fertile » a besoin de 2 neutrons (au lieu d’un seul) pour fissionner : un premier neutron – à la bonne vitesse – le rend fissile, et après avoir reçu un deuxième neutron, il fissionnera à la manière de l’Uranium 235.
Les éléments fertiles sont bien plus abondants que l’Uranium 235 : environ 200 fois plus pour l’Uranium 238, par exemple, et 4 à 500 fois plus pour le Thorium 232. Les surgénérateurs ont d’autres avantages : ils permettent de « brûler » le plutonium issu du retraitement des déchets des centrales classiques ou du démantèlement des armes nucléaires et font moins de déchets finaux que les réacteurs classiques.
Mais comme il est techniquement plus facile de gérer des matériaux fissiles que fertiles, et surtout que les matériaux seulement fertiles sont inappropriés pour faire des armes, dont la fabrication a historiquement (et malheureusement) été la raison première de s’intéresser au nucléaire, c’est d’abord aux matériaux fissiles que l’attention a été portée, malgré qu’ils soient les moins abondants.
Cela ne signifie pas que la surgénération – donc l’exploitation des matériaux fertiles – soit hors de portée. Nous avons par exemple eu un surgénérateur raccordé au réseau en France : Superphénix. Il n’a pas été abandonné parce que « cela n’aurait jamais marché », puisque la centrale a fourni du courant au réseau pendant plusieurs années. Certes, elle n’a pas fonctionné dès le premier essai, et a connu des ennuis techniques divers (mais jamais très graves), mais que les choses ne marchent pas du premier coup est plus la règle que l’exception en matière de recherche ! Car Superphenix était un prototype, pas un réacteur commercial.
Que Superphénix ait correctement fonctionné ou pas, son abandon a de toute façon été essentiellement politique, consécutive à l’arrivée des Verts au pouvoir, dont la lutte contre le nucléaire civil (étonnamment on ne les entend presque jamais pester contre le nucléaire militaire) est le ciment fondateur.
Il existe aujourd’hui dans les cartons des projets divers de surgénérateurs, utilisant des technologies différentes de Superphénix (qui présentait des faiblesses, assurément, par exemple utiliser du sodium fondu comme fluide de transport de la chaleur, cela n’enthousiasmait pas grand monde…). Mais seront-ils lancés à temps pour nous offrir la marge de manœuvre qu’ils nous permettraient ? Il faudrait en effet quelques dizaines d’années, difficilement compressibles, entre la décision de construction d’un prototype et le raccordement au réseau d’une installation commerciale : en aucun cas un recours significatif au nucléaire ne peut s’actionner à bref délai le jour où nous déciderons que nous avons assez vu le pétrole comme cela.
Enfin, à plus long terme (mais les spécialistes pensent qu’il est illusoire d’espérer quoi que ce soit avant 50 à 100 ans) la fusion, qui est aussi une énergie nucléaire, sera peut-être mise au point. Il est du reste assez amusant que les « antinucléaires » soient plus « anti-fission » (contre l’uranium), ou « anti-surgénération » (contre le plutonium) que « anti-fusion » (contre le tritium), alors que, fondamentalement, ce sont uniquement des manières distinctes d’exploiter une même énergie nucléaire (c’est-à-dire qui provient du noyau de l’atome, nucleus en latin). La fusion n’est-elle pas parfaite, aujourd’hui, essentiellement parce qu’elle est toujours virtuelle ?