Fanair a écrit : ↑jeu. août 22, 2019 1:32 pm
un livre sympa un bon équilibre texte, photos, profils, un bon rapport qualité/ prix, j’achèterai le tome 2 lorsqu'il paraîtra.
OK, merci pour l'information. Je ferais en sorte de me le procurer dans les prochains. Pas forcément dans l'immédiat puisque je viens de dépenser une assez grosse somme pour la copie de plusieurs documents d'archives relatifs au No.615 Squadron (ainsi que divers bouquins relatifs à la Bataille d'Angleterre). Archives qui fournissent quelques détails intéressants en suppléments notamment sur la période Bataille de France.
C'est, par exemple, le cas du Flight Lieutenant Leslie T.W. Thornley
NB : oui, je viens de découvrir par hasard que depuis plusieurs années j'écris de façon erronée "Flight Lieutnant" au lieu de Flight Lieutenant...
16 Mai 1940
Dans l’après-midi (15h00), neuf Hawker Hurricane Mk I du No.615 (County of Surrey) Squadron décollent sous les ordres du Flight Lieutenant Leslie Thomas Wing Thornley afin d’escorter un Westland Lysander. Entre Tirlemont et Bruxelles, les pilotes britanniques sont surpris par plusieurs Bf.109. Le Flight Lieutenant Leslie T.W. Thornley (N2335) est immédiatement abattu, dans les environs de Rosières, et tué.
Selon le Pilot Officer Thomas Colenutt Jackson (N2338) :
« J’ouvre la verrière, car je n’arrive pas à voir grand-chose à l’arrière. Quasiment au même moment, alors que nous volons avec le soleil derrière, nous avons été pris par surprise. Je ne m’en suis rendu compte qu’après avoir été touché une première fois. Un appareil passe sous moi et j’essaye de le poursuivre, mais mon moteur coupe. Un second Bf.109 et j’ai ma chance – je crois voir quelques débris. Je continue à tirer dessus par-derrière. Plein d’avions dans le ciel. Mon appareil est, alors, gravement touché et soudain une explosion. J’ai mes lunettes, mes bottes, mais plus mon casque. Je ne débranche pas l’arrivée d’air, etc., mais je bondis tout simplement en dehors. J’ouvre le parachute et ne peux m’empêcher de songer : « dieu que c’est calme ».
Il est capturé dès son arrivée au sol par des soldats allemands. Blessé et souffrant de plusieurs brûlures, il se souvient :
« Un soldat sort un couteau et ouvre mon col, tandis qu’un autre sort une seringue pour m’injecter un calmant. Un véhicule arrive et on m’ordonne de grimper dedans ; un Oberleutnant s’assit à l’arrière en me braquant son pistolet. Je suis conduit à un hôpital de campagne à Tirlemont où je partage pendant deux jours une chambre avec huit ou neuf officiers allemands ; l’un d’eux gravement blessé à l’estomac étant très bruyant. Peu après, je suis transféré dans un grand bâtiment avec un sol en pierre où sont concentrés plusieurs centaines de soldats britanniques, avant d’être conduits, une semaine après, vers Maastricht ».
Un troisième pilote est perdu, en l’occurrence, le Pilot Officer Brian Pashley Young dont le Hawker Hurricane Mk I (P2577) s’écrase en flammes près d’Essene. Brûlé dans le haut du corps et au visage, il parvient cependant à sauter. Il est, toutefois, malchanceux puisqu’il est immédiatement pris pour cible par des soldats britanniques qui ouvre le feu dans sa direction, puis lance une grenade, avant de s’apercevoir qu’il s’agit de l’un d’entre eux. Il est conduit vers un hôpital de campagne à Dieppe avant d’être évacué vers Saint Nazaire. N’ayant décidément pas de chance, son ambulance est touchée, en arrivant dans le port, par un éclat d’obus tuant la quasi-totalité des occupants. Brian P. Young en réchappe miraculeusement afin d’être embarqué dans un navire à destination de l’Angleterre. Il ne reviendra plus au No.615 Squadron. Après une longue hospitalisation, il reprend du service courant 1942 comme pilote d’hydravion Short S.25 Sunderland au sein du Coastal Command, avant d’être transféré au Moyen-Orient dans divers commandements. Il reste dans la RAF après la guerre en exerçant toute une série de hauts postes, tout en suivant les cours de l’Imperial Defense College. Il prend sa retraite le 5 mai 1973 avec le grade de Air Vice-Marshal et décède le 26 juillet 1992.
Il est difficile de pouvoir identifier l’affrontement en question faute de disposer de l’heure durant laquelle cette escorte a eu lieu. Ainsi, Brian Cull et Donald Caldwell font mention d’un affrontement vers 15h50 avec le II./JG 26, lesquelles revendiquent trois victoires (identifiés comme des Morane 406 et Hawk 75A) malgré la perte d’un appareil (pilote tué). Cette analyse est, toutefois, démentie par Arnaud Gillet et Peter D. Cornwell qui y font un lien avec les événements propres au No.87 (RAF) Squadron. Une autre hypothèse serait celle du I./JG 27 qui revendiquent plusieurs Hawker Hurricane dans les environs de Bruxelles vers 13h40 (malheureusement une partie de ces revendications ne disposent pas d’heure précise). Ainsi, selon cette dernière hypothèse, le Flight Lieutenant Leslie T.W. Thornley serait tombé victime de l’Oberleutnant Gerhart Framm de la 2./JG 27. Inversement, deux Bf.109 E-3 de la I./JG 27 aurait été endommagé, dont celui du Feldwebel Otto Sawallish. Une fois de plus, faute de davantage de précisions, il reste délicat de faire correspondre les faits, sans compter que rien ne prouve que l’ensemble des événements propres au No.615 Squadron ait lieu lors de la même sortie.
Le Flight Lieutenant Leslie T.W. Thornley avait 26 ans... Canadien d'origine, il avait rejoint le No.615 (County of Surrey) Squadron dès sa création (21 août 1937) et assuré le commandement du A Flight à partir de l'été 1939.
Le mystère du Flight Lieutenant Leslie T.W. Thornley s'épaisse cependant davantage...
En effet, en consultant les services de la Commonwealth War Graves Commission, on s’aperçoit qu'il ne dispose d'aucune tombe mentionnée. Son nom est uniquement commémoré au Runnymede Memorial.
https://www.cwgc.org/find-war-dead/casu ... MAS%20WING
Pour rappel, le Runnymede Memorial regroupe les noms d'environ 20 000 aviateurs, issues de l'Empire britannique, qui ne dispose d'aucune sépulture aujourd'hui connut.
C'est donc le cas du Flight Lieutenant Leslie T.W. Thornley.
Toutefois une nouvelle inconnue apparaît dans l'équation. En effet, depuis maintenant 2 - 3 ans, les archives nationales britanniques ont décidé d'ouvrir progressivement les rapports de pertes de la RAF (actuellement jusqu'en 1942, l'année 1943 est en cours de classement...).
Ces dossiers sont intéressants à plusieurs titres :
- l'ouverture est récente, il s'agit donc d'informations qui n'étaient pas disponibles auparavant pour la recherche ;
- ces dossiers, de taille variable (quelques pages à plusieurs centaines), regroupent l'ensemble des pièces relatives à l'enquête menée par les autorités britanniques concernant la perte d'un aviateur : rapport d'enquête, échange avec les autorités allemandes (ou autres) et la Croix rouge, courriers échangés avec les familles (souvent les pièces les plus émouvantes).
Dans le cas du Flight Lieutenant Leslie T.W. Thornley, il s'agit du dossier AIR 81/743 (TNA, Kew) ouvert le 3 juin 1940.
Le dossier semble cependant être conclue en juillet 1941 par un courrier particulièrement émouvant de son père, lequel porte aussi le prénom de Leslie : "(...) and I suggested that so far as your files were concerned you could consider the matter was closed as between us, as nothing more, I fear, remains to be done. Thanking you, however, for your assistance. Yours faithfully. L.Thornley.
(on découvre, accessoirement, grâce à l'entête de la lettre que son père travaillait pour la Commercial Union Assurance Company Limited, London).
Le dossier ne semble plus connaitre la moindre évolution après cette date, toutes les pièces datant des mois précédents et il est officiellement classé en juin 1947.
Ainsi, il apparaît que la chute de son appareil a été observée par des soldats britanniques du Lancashire Fusiliers sous les ordres du Second Lieutenant D.B. Spiers. Le Hurricane se serait écrasé dans les environs de Rosières-Saint-André et Tombeek, tandis que le Flight Lieutenant Thornley serait mort sur le coup. Le pilote aurait été identifié grâce à son Identify Card, tandis qu'un étui à cigarettes (en or) et un pistolet auraient été récupérés et envoyés immédiatement au commandement du Lancashire Fusiliers.
Le Second Lieutenant D.B. Spiers aurait ensuite inhumé peu après le pilote dans une tombe marquée d'une simple croix et de son nom. Le Second Lieutenant Spiers sera capturé dans la soirée avec son unité et interné par la suite au Oflag VII C, d'où il fournira ces informations. Malheureusement la Croix rouge ne sera pas autorisée par les autorités allemandes à organiser un plus ample interrogatoire à ce sujet. Le dossier ne fournit, par ailleurs, aucune autre information sur le sort postérieur du Second Lieutenant D.B. Spiers.
https://aviationaoi.com/wp-content/uplo ... nley_2.jpg
L'interrogatoire mené par la Croix rouge permet, cependant, de fournir deux croquis représentant l'endroit où aurait eu lieu l’inhumation.
https://aviationaoi.com/wp-content/uplo ... 883937.jpg
https://aviationaoi.com/wp-content/uplo ... 930144.jpg
On note aussi quelques détails sur la mission du 16 mai 1940
https://aviationaoi.com/wp-content/uplo ... 876436.jpg
https://aviationaoi.com/wp-content/uplo ... 983700.jpg
Malheureusement comme indiqué, le dossier se termine en juillet 1941 avec le dernier courrier de son père. Rien de permet de savoir si des recherches ont été effectuées pour retrouver la tombe par la famille ou les autorités britanniques. Est-ce que la tombe a été perdue ? Le corps déplacé ultérieurement vers un lieu non répertorié ? L'emplacement non retrouvé, car erreurs dans les croquis ?
La seule information sûre étant que son nom est uniquement inscrit sur le Runnymede Memorial selon les registres de la Commonwealth War Graves Commission.