Avions de 14-18 vues par ceux qui les font voler !
Publié : dim. août 21, 2011 5:53 pm
Les appareils 14-18 vue à travers le regard des membres et pilotes du Mémorial Flight.
Récit fort intéressant sur le comportement de ces avions et la manière de les piloter.
L'association Mémorial Flight est l'une des rares dans le monde à faire voler des avions de la premières Guerre Mondiale ou leurs copies. Voici, tirée de son expérience, quelques esquisses de ces machines pour tracer un portrait des débuts de l'aviation de combat. De la plupart de ceux-ci, la mémoire retient généralement la légende; mais la mémoire fait souvent défaut...
Cette aviation là est à redécouvrir !
Alain Vallet, cofondateur et président de l'association.
L'association possède une bonne idée des qualités de vol de ces avions et de leur comportement en combat. Cependant, avant d'aborder le sujet, Mr Vallet met en garde contre toute mauvaise interprétation:
" Nous ne devons pas porter de jugement de valeur. Nous avons tous une expérience que les équipages et les ingénieurs de l’époque n’avaient pas. Inversement, ils savaient maîtriser des phénomènes que nous avons oubliés. Leurs références n’étaient absolument pas les notres. A l’époque ils ne connaissaient que ces avions rien d’autre .Nous ne pouvons pas ressentir ce que ressentaient les pilotes de l’époque, parce que notre formation, nos connaissances, sont différentes. Ils nous faut considérer que ces avions là c’est simplement un autre monde par rapport à la chasse-, d’autres sensation, un autre inconfort, un pilotage qui n’existe plus et qui était celui des premiers avions d’armes. En 1914, on ne volait pas comme aujourd’hui ou il convient de réduire les risques et de simplifier le pilotage ; on ne comptait pas trop les vies. Ces avions ont été conçus dans ce contexte avec des mentalités très différentes des nôtres.
La conduite des moteurs, à l’exception des rotatifs, n’est pas fondamentalement différente de celle des moteurs à pistons modernes (manette de gaz et manette de mélange ), malgré la magnéto de départ et le réglage de l’allumage de certains mais leur usage présente plus de limites. Par exemple, en cas d’accélération négative, assez fréquente en combat, le risque d’arrêt est élevé. Des pilotes étaient souvent contraints de s’éloigner d’une mêlée pour remettre en route en piquant- encore que sur le Spad, l’Hyspano-Suiza surcomprimé est quasiment impossible à relancer en vol (dixit le manuel ! ) ; Et, quand ils revenaient, souvent le ciel était vide !
Les caractéristiques générales que l’on peut dégager du pilotage de ces avions la grande hétérogénéité des commandes, l’importance des effets secondaires, des couples de renversement et du gouvernail, tout à fait primordial ; le gouvernail de direction est la commande principale sur tous ces avions à cause d’un manque d’efficacité général des commandes de roulis (par ailerons ou pars gauchissement de la voilure ). C’est un pilotage « tout au pied « avec des commandes sans homogénéité (y compris d’un avion à l’autre).
Ces avions ne sont pas stables au sens ou nous l’entendons ; il faut les tenir en permanence. La stabilité d’un avion dit « stable » de 1917 est une catastrophe par rapport à un avion de 1990. Cette complexité explique pourquoi la formation des pilotes pendant la première guerre mondiale était lente et compliquée avec plusieurs types d’avions et …plus de pertes parmi les élèves qu’il n’y en avait au combat (source : les accidents dans la RAF 1917-1918)
Le Spad XIII, moteur Hispano-Suiza 8be, V8 sur-comprimé de 220 ch par Baptiste Salis
Pas facile de monter dans cette avion, car le premier étrier est assez haut. On s'agrippe au mâts pour se hisser de l’étrier au marchepied sur le pot d'échappement. La cabine est très étroite; un grand comme moi ( 1.90 ), doit se contorsionner pour y rentrer après avoir posé les deux pied sur le siège, puis , une fois assis, se plier pour abriter sa tête du courant d'air- même si le petit saut-vent est efficace. Un grand se penche pour voir le compte-tour de gauche,un peu avancé, et lire pressions d'huiles et d'essence. Mais il ne peut pas lire le badin qui est trop en retrait.
La position des jambes est un peu bizzare, du fait du mouvement du palonnier, avec le moteur entre les pieds. Au dessus de chaque pied se trouve les magnéto; on les entend bien tourner quand le moteurs est en marche ! La mise en route est un peu particulière car le moteur Hispano est puissant avec énormément de compression et est réducté. L'hélice est lancée en sens inverse, pour rebondir sur la compression précédente. Le pilote doit être bien coordonné avec le lanceur de l'hélice pour activer de la main droite la petite manivelle de la magnéto de départ au moment ou l'hélice rebondit.
Il est la parfaite illustration du manque d'homogénéité des commandes des avions de cette guerre: une direction qu'on ne sent pas , quelle que soit la vitesse; une profondeur douce. Le couple de l'hélice est aussi très important: au décollage, il est primordial de maîtriser l'avion dans les 10 à 20 premiers mètres de sa course, sinon ...Mais, une fois en ligne de vol, la machine accélérant, c'est fini; elle part bien droit et décolle très vite.
Au roulage l'avion est très lourd de l'arrière avec une béquille fixe. Avec la puissance on arrive à faire des zigzags, mais pour le demi-tour, il faut se faire aider. Comme ce moteur Hispano est réducté, il faut qu'il reste en charge en permanence, et on évite le tout réduit. Mais il est très réactif: quand on avance la manette de gaz, la réponse est immédiate et brutale. Un vrai coup de pied dans le c...! Je ne connais rien d'équivalent , même dans les avions modernes. On met donc la puissance doucement au décollage, pour garder le contrôle et contrer le couple, car la gouverne de direction est un peu petite, mais très vite le moteur s'échappe.
Cette avion est très dur au commandes sur tous les axes. en vol, il faut bien anticiper , car une fois qu'il est inscrit dans sa trajectoire , il est vraiment ancré dedans. Il fend l'air comme une balle ! Dans les passages on doit atteindre 350- 400 km/h. Le plus étonnant est qu'il ne produit pas plus de bruits aérodynamiques et ne vibre pas plus quand il accélère, malgré la profusion de haubans.
Les commandes sont dures partout; pour la profondeur passe encore mais les ailerons sont très vite en béton.L'avion est peu manœuvrant et n'est pas fait pour le combat tournoyant. Juste une passe bien préparée, bien ajustée, et un dégagement pleine vitesse ! La visibilité vers l'avant n'est bonne que quand on pique vers l'objectif. Sinon , on ne voit que sur les cotés.
A l'atterrissage, seul la vision périphérique est utile. A l'arrondie, le pilote ne voit rien et exécutes "de tête" en quelque sorte. Il ne faut pas croire qu'il soit plus simple de se poser queue haute car, si c'est plus facile jusqu'au toucher des roues, ensuite l'empennage n'étant plus soufflé, l'avion n'a pas de freins part dans tous les sens. ce n'est pas forcément méchant , mais c'est incontrôlable. Le manuel de vol exige donc un atterrissage trois points. C'est pour éviter les accidents plus que pour réduire la longueur de l'atterrissage qu'un arret rapide était exigé, même si sur les champs d'aviation il y avait de la place. Ainsi les béquilles étaient généralement munies d'une lame métalliques qui s'enfonçait dans la terre. En fin de guerre, certains avions allemands ont été équipés d'un levier pour abaisser des crocs qui se fichaient dans le sol.
En vol, s'il va vite( +de 200 km/h), le Spad est plus stable que ses contemporains. C'est une très bonne plateforme de tir, bien que, même dans ces conditions, le tir demeure très instinctif et ne porte qu'a très courte distance. Le tir au canon ( sans l'aide du radar bien sur!) exige toujours ces qualité, mais c'était encore plus valable en 1914 quand les vitesses étaient faibles et le taux de montée misérables. De ce fait, l'approche de l'adversaire pouvait être très longue. Il était très important de savoir se placer et de connaitre à fond les capacités de son avion en raison de son manque relatif de puissance pour récupérer une interception manquée ou s'échapper en piqué plein gaz... sauf abord d'un Spad. Cet avion à atteint en piqué sans dommage 450 km/h ( le badin du Spad n'était gradué que jusque là! ) Il était le seul qui offrait la possibilité d'engager à volonté, grâce à sa vitesse élevée, même s'il n'était pas le plus grand manouvrier.
Le Spad est une bête ! Un avion agressif dans son image comme dans comportement, inconfortable, plaçant son pilote dans un puissant courant d'air permanent, chargé d'odeurs d'huiles et d'essence avec des magnétos entre les molets qu'il faut tenir inconfortablement écartés; ils n'offre une visibilité qui n'est bonne que vers le haut, les cotés et vers l'arrière, et partout ailleurs très mauvaise, comme s'il fallait qu'il absorbe son pilote à l'intérieur de son fuselage.
Puissant, rapide, le Spad est plus intercepteur que chasseur. Tout le contraire du Fokker DVII.
Vidéo Spad XIII
Le Fokker D.VIIF, moteur BMW IIIa, 6 cylindres de 185 ch par Edmond Salis:
Le Fokker D.VII a garder à travers les décennies une réputation terrible, puisque c'est le seul avion allemand spécifiquement mentionné dans le traité de Versailles qui scellait la fin de la Première guerre mondiales. Mais comparé au Spad il n'est pas survitaminé ! Il est sauvé par son profil de voilure épais qui élargit considérablement son domaine de vol en lui donnant la possibilité d'évoluer avec des angles d'incidence interdits à ses concurrents. Il est en outre confortable , c'est même un vrai salon ! Sa stabilité est bonne et sa manœuvrabilité plutôt convenable, mais ses commandes restent assez lourdes. A 1200 tours en ligne droite, il est placide; il ne révèle sa nature de chasseur qu'en haut régime vers 1300 à 1350 tours. Ce sont les derniers chevaux qui comptent et changent un avion...
Il faut véritablement escalader le D.VIIF pour monter à son bord, si on empreinte le chemin traditionnel de l'étrier et du marchepied. Donc un petit escabeau est tout aussi bien ! Le poste de pilotage est très spacieux et l'ergonomie très correcte. Le démarrage du moteur repose sur un savant dosage du mélange air essence, le geste du lanceur et la bonne coordination avec le pilote qui actionne la magnéto de démarrage.
A l'arrière la béquille est fixe, ce qui rend le roulage difficile, surtout quand il y a du vent, car l'avion lui offre beaucoup de prise. La visibilité vers l'avant est nul, mais en penchant la tête sur le coté on y voit suffisamment; le mieux est quand même d'avoir des aides pour assurer que la voie est bien dégagée. Néanmoins il est très difficile de faire des S.
Le moteur déborde d'énergie, mais reste souple. Le décollage est impressionnant, car le moteur emmène l'avion très vivement. Mais comment la gouverne de direction est de bonne taille et bien soufflée, le DVII reste contrôlable sans trop de problème. Il accélère très fort quand le moteur passe 1100tr/min- un peu comme un Pitts. Les commandes sont très homogènes sans être légères, et se manoeuvrent avec un débattement normal. En vol , le DVII est stable, s'inscrit bien dans ces trajectoires et y reste. son pilotage est assez intuitif; il suffit de visualiser la trajectoire pour qu'il la suive, sans que le pilote ait à faire d'action hors normes. Les effets du moteur se font sentir, mais ne nécessitent pas de grosses actions pour corriger. De temps à autre, dans les hauts régimes, il lâche une bouffée de fumée noire qu'on voit bien passer à droite- la sortie de l'échappement est à un petit mètre du poste de pilotage. Quand on pousse sur le manche, le DVII accélère fort, sans geindre ni siffler.
Pour le poser, je favorise l'encadrement [ atterrissage gaz réduits ou moteur coupé ], en gardant néanmoins un filet de moteur. Il faut faire attention à ne pas arrondir trop haut, car le train est assez souple et l'avion rebondit facilement. AU roulage, il faut veiler à garder le gouvernail soufflé pour lui redonner de l'efficacité sinon, à basse vitesse, on n'a plus de défense?
Vidéo Fokker DVIIf
Le SE-5a, moteur Hispano-Suiza 8b de 180 ch par Baptiste Salis
Le SE-5A est l'avion le plus facile de notre flotte. Pour autant sont pilotages ne correspond pas à celui des avions modernes. C'est à part...Pas plus compliqué, non, mais autre chose, une autre façon d'anticiper, avec beaucoup d'effet secondaires . Le plus compliqués et dangereux était le changement du chargeur de la mitrailleuse posée sur l'aile: faire basculer l'arme devant soi, enlever le chargeur, le poser sur ses cuisses, prendre le chargeur plein, le mettre en place, armer, ramener l'arme en position, ranger le chargeur vide... Le tout en tenant le manche entre les genoux. La manœuvre complète demandait moins de 20 secondes. Cela paraît peu, mais c'est largement suffisant pour se faire descendre sans pouvoir se défendre !
Monter dans le SE-5a est, comparativement aux autres, très facile. Il suffit d'utiliser le marche pied. Le trou d'homme est plus étroit, mais le poste de pilotage est bien plus large. Le tableau de bord est très lisible, beaucoup plus moderne que ceux du Morane AI et du Spad, plus proche de ce que nous connaissons aujourd'hui. L'avion est équipé d'un compensateur de profondeur qui ajuste l’orientation du plan fixe; il faut penser à le régler, sinon l'avion devient désagréable à piloter dans certaines configurations.
La mise en route est facile et aisée. on lance l'hélice sur le rebond, comme sur le Spad. La différence est que la magnéto de démarrage est fixé à l'extérieur du fuselage ; il faut donc passer le bras par-dessus le bord du poste de pilotage pour l'atteindre. Le moteur est souple, car il n'est pas réducté comme celui du Spad. La visibilité est assez bonne, comparativement au autre avions du Mémorial Flight, même si ce type de vision vers l'avant a de quoi effrayer le pilote qui ne connait que des avions plus modernes.
Au roulage , son patin orientable est conjugué au palonnier: (voir photo ci-contre)
En vol, la seul chose vraiment notable est que le SE-56a beaucoup de roulis induit. Dès qu'on entre dans le virage, il s'incline de plus en plus et il faut mettre le manche dans le sens opposé. Toutefois, les amplitudes d'action sur le manche ne sont pas très grandes, mais les ailerons sont un peu mous. Les actions sur les commandes sont assez homogènes sur les trois axes, ce qui rappelle énormément le " Tiger Moth"
Le SE-5a ne vole pas très vite comparé aux autres, mais, dès qu'il accélère, on est averti car ses haubans se mettent à siffler ! A l'atterrissage , je choisis une approche de type planeur, avec une pente assez forte et le moteur à bas régime- mais pas réduit.
Vidéo SE5a
Le Fokker DRI, à moteur rotatif Clerget français de 130 ch en lieu et place de l'Oberursel de 110 ch de base par Edmond Salis
Pour monter dans un DR.I, il faut être jeune et souple ! Le moteur de celui de Mémorial Flight est un Clerget rotatif, comme celui du Morane AI. Ce n'est pas une incongruité car les pilotes allemands, peu satisfait par l'Oberursel de 110 ch qui motorisait l'avion en Allemagne, se jetaient sur le Clerget dès que qu'ils pouvaient en récupérer un sur un avion allié capturé. Un des triplans pilotés par Joseph Jacobs était équipé d'un moteur et d'une hélice provenant d'un " Camel " britannique posé derrière les lignes allemandes. Le Clerget de 130 ch était réputé supérieur à tous les autres moteurs rotatifs simplement concurrencés par le Bentley.
Même procédure de démarrage et même odeur entêtante d'huile de ricin, même problème de ralenti au roulage. Du fait de l'aile médiane, on ne voit absolument rien devant, rien de rien, encore moins que sur les autres ! Au décollage, on ne voit devant qu'an ligne de vol. Mais il ne faut pas pousser sur le manche trop tôt, sinon on accentue les effets gyroscopiques.
Les commandes sont efficaces, notamment les ailerons, avec des débattements assez faibles. La particularité de cette avion est qu'il est très instable, tout le temps. La bille se balance en permanence. En ligne de vol, on y voit un peu mieux vers l'avant; cependant en vol de groupe, il faut être très attentif car les angles morts sont nombreux. La manœuvrabilité le rapproche du Morane AI, mais son extrême instabilité n'incite pas à aller jouer dans les coins. L'atterrissage présente les mêmes difficultés que les autres.
Le Fokker triplan que Manfred von Richthofen fit rentrer dans la légende était agile, mais pas assez puissant et trop lent... Bref il n'était pas à la hauteur de sa terrible réputation ! Le DR.I avait aussi la réputation d'être un excellent grimpeur, Oui, il monte bien... mais pas longtemps. Sa ressource est très courte- une centaine de mètres - parce qu'il manque de puisssance. C'est pour cela que ses pilotes recherchaient les rotatifs Clerget, plus fiables et plus musclés que les rotatifs allemands. La notoriété de cet appareil, construit à 320 exemplaires, est principalement due au fait que Manfred von Richthofen fut tué à bord de l'un d'eux. Le triplan Sopwith qui était un bien meilleur appareil est resté quasi inconnu du grand public. Quand à la grande maniabilité du DR.I, elle est inférieur à celle du Morane-Saunier AI, qui, dans ce domaine, devait être le nec plus ultra de son temps.
Vidéo Fokker DRI
Le Morane Saulnier AI, moteur Clerget rotatif de 130 ch par Baptiste Salis
Le Morane Saulnier AI, dont l’insuccès demeure mystérieux. Son principal défaut était son moteur rotatif qui lui retirait la possibilité d'opérer à haute altitude et pouvait le limiter en vitesse. Malheureusement il avait été conçu autour de ce type de moteur.
Il a pratiquement les mêmes dimensions que le Spad XIII. là aussi, il est bien pratique d'avoir des grandes jambes pour monter à bord. Il est particulièrement difficile de mettre le pied dans l'étrier, car comme le fuselage est de section ronde et que cet étrier est fixé pratiquement en dessous, il faudrait, pour bien faire, avoir le genou articulé à l'envers ! On agrippe la poignée sur le flanc du trou d'homme et le haut des mâts. Puis on enjambes et on pose les deux pieds sur le siège pour ensuite se couler dans l'habitacle. Celui-ci est assez spacieux pour un grand de 1.90 m. Le pare-brise remonte suffisamment haut, la position du manche est agréable.
Il n'y a pas d'indicateur de vitesse. Le moteur est un Clerget rotatif - la "Rolls" des rotatifs. Sa mise en route ne repose que sur le lanceur, il n'y a pas de magnéto de départ. La préparation consiste soit à injecter de l'essence directement dans les cylindres avec une burette, par la soupape d'échappement, soit à faire pisser un filet d'essence par le frein filtre, qous le moteur, puis à régler la manette de gaz avant que le lanceur brasse de façon énergique. On entend alors très nettement le moteur aspirer l'essence; le bruit de succion est net. Puis on le lance dans le sens de la rotation et il démarre superbement bien. la particularité de ces moteurs est le Tampier: il ne s'agit pas d'un carburateur à proprement parler, du type comme à flotteur, mais d'un système de guillotine avec des peits gicleurs qui nécessite un ajustement quasi-permanent de la mixture en fonction des gaz. Pratiquement à chaque action de la manette des gaz, il faut réajuster la mixture, sauf quand on est dans la zone de plein gaz. Bien sûr, dès que le moteur est lancé, on est enveloppé par l'odeur de l'huile de ricin- mais pas aspergé car les capots qui recueillent
l' huile giclant des échappements sont bien construits.
Au roulage , on ne voit rien devant; l'avion est très cabré. Le train est souple, les amortisseurs ont tendance à faire sauter l'avion si te terrain est trop cahoteux. Le problème du roulage est que les rotatifs sont difficiles à tenir au ralenti, et s'encrassent vite. Donc il faut procéder par coups de gaz.
Au décollage plein gaz; il a beaucoup de couple ( pas autant que le Spad ), et il faut enfoncer le palonnier du coté opposé. Ce couple se fait également fortement sentir dans les montées. L'étonnant avec cette avion est qu'il ne faut pas chercher à tenir la bille au milieu dans les virages car alors il vole bizarrement, en dérapant. Ses commandes sont extraordinnaires, montées sur roulements, très douce sur tout les axes à toutes les vitesses - elles peuvent être comparées à celles di Bücker " Jungmeinster" qui est la référence absolue en la matière. De plus les ailerons possèdent des oreilles de compensation aux extrémité, ce qui procure une forme d'assistance.
Par rapport au Spad, qui est très stable l'AI est instable. Il se prête parfaitement à la voltige, aux évolutions très serrées, donc au combats tournoyant. Il tourne littéralement sur le bout de sont aile, dans un mouchoir de poche et reste agréable au basse vitesses. Je ne connais aucun avions qui tourne plus serrés que lui... même le "Jungmeister" ! L' AI à vraiment été conçu pour la maniabilité avec des commandes rigides montées sur roulement à bille . Du haut de gamme ! Il tourne très bien un tonneau... Ce n'est plus du tout le Spad ou l'on entend les commandes d'ailerons couiner et grincer quand on est encore au sol. Au contraire, l'AI est très agréable à piloter, mais son problème est son moteur rotatif qui limite considérablement son plafond. Il est parfait en basse altitude, mais, en 1917, le moteur Hispano- Suiza amenait assez facilement un Spad à 6000 m, et l'on savait depuis les débuts de la chasse que l'avantage de l'altitude était un facteur extrêment important dans la réussite d'un combat.
Cette avion a été, très peu utilisé, dans trois escadrilles seulement, puis réparti en petites quantités dans un petit nombre d'unités, pour le plus grand plaisir des pilotes qui pouvaient profiter de ses qualités en toutes quiétude hors des combats. Son manche est incliné de 15° vers l'avant. C'est une particularité commune à la plupart des avions de combat de 14-18 pour cette raison qu'il fallait plus de débattement pour cabrer que pour piquer, principalement lors de l'atterissage.
Pour le poser, l'approche peut être celle du Pitts, en glissade, avec posé trois-points. Surtout ne pas toucher de l'arrière d'abord, sinon c'est immédiatement le cheval de bois !
Vidéo Morane Saulnier AI
Le Sopwith 1B2 ( version française du fameux biplace 1 1/2 "Strutte" britannique), moteur rotatif Clerget de 130 ch ( en cours de restauration pour remise en état de vol )
Le Sopwith "1 1/2 Strutter" désigné 1B2 en France, fut commandé pour remplacer les avions à moteurs arrière, en attendant le Bréguet XIV. Il n'emportait que 60 kg de bombes.
Le Sopwith 1B2 de 1916 est un avion beaucoup plus moderne (en comparaison au Blériot XI-2 de 1913). IL a été le premier à être muni de "frein sur l'air" ou de "frein à air"... Comprenez aérofreins. Toutefois, il est écrit dans le manuel de pilotage que leur usage est réservé à des pilotes confirmés. En lisant entre les lignes, on comprend que c'était à un coup, destiné à arrêter l'avion en 20 m lors d'un atterrissage imprévu, avec une descente en très forte pente qui, à mon avis équivalait à un crash contrôlé. Par contre, le plan fixe de l'empennage horizontal était réglable en vol, un mécanisme très rare à l'époque, propres à certains avions britanniques... et aux avions convenablement équilibrés. Malheureusement, le Sopwith était trop stable et manœuvrait très mal... Nous avons volé sur une réplique de ce Sopwith aux Etats-Unis, motorisée avec un Gnome rotatif. Elle était très stable, très douce. Vous la mettiez en virage, elle y restait... Un pilotage pas pointu du tout pour l'époque, mais des capacités de manoeuvre à peu près nulles. Une vrai cible ! Un cercueil volant ! D' ou des noms de baptême comme: " Qu'est ce qu'on rigole " ou " Pourvu que ça dur" . Or à cette époque, le biplace était une cible privilégiée pour les chasseurs; c'est lui qui portait les bombes ou qui observait les positions des troupes au sol pour renseigner les états-major, et la vocations des chasseurs était de protéger le biplace ami ou d'interdire l'aviation de reconnaissance ou de bombardement ennemie.
Le RAF Be-2, moteur RAF 4a de 90 ch, dérivé britannique amélioré d'un V8 Renault de 80 ch, refroidi par air.
Le Be2 a précédé le Sopwith et en a aussi été le contemporain. Il est l'exemple même de l'avion qui ne peut pas évoler malgré une succession d'améliorations. Typiquement anglais, ça, je plaisante ! : un concept de base sans cesse modifié.
Le Be2 est laid, bizarrement dessiné avec un fuselage en poutre rectangulaire carénée uniquement autour de son équipage. l'observateur est à l'avant dans un habitacle trop étroit avec des bidouilles pour pouvoir utiliser une mitrailleuse en défense par dessus la tête du pilote ! Mais cela lui confère une personnalité certaine, le charme fou d'un avion très désuet.
Au départ c'était un concept d'avant-guerre sans empennage vertical fixe. A suivi le Be2C avec une petite dérive. Elle n'a pas donné de résultat et a été remplacé par une plus grande... en vain. Par conséquent, on a ajouté quelques mètres à l'envergure de son aile supérieure, puis on a sorti le Be12 plus puissant... Tout a été tenté pour le rendre efficace: observation, puis bombardement et chasse de nuit, toujours sans grand résultat.
J'ai eu le privilège de voler sur l'un d'eux en Nouvelle-Zélande. Le manche à balais est très long pour donner au pilote un bras de levier maximal. Malgré ça, il faut le tenir à deux mains- raison pour laquelle la commande de gaz est placée sur le manche-, cette commande demeure très lourde mais , en roulis, n'a pas d'effet s fantastiques, et le compensateur à ressorts de la profondeur est réglable au pied. Sur le Be2F, la surface des ailerons a été nettement augmentée sans que cela y change grand-chose. L'avion évolue donc très mal bien qu'il soit docile, plutôt sympathique. Il n'avait aucune chance contre un chasseur arrivant par dessous. Trop mauvais en combat aérien, il a fini comme bombardier de nuit. Le notre sera ainsi présenté.
Construction d'un LVG C.VI ( Luftverkehrs Gesellschaft ), moteur Benz Bz IV de 230 ch et projet d'un Aviatik C.1, moteur Mercedes de 160 ch
Le LVG C.VI, résume à lui seul tous les progrès accomplis par l'aéronautique en quatre ans. Il n'est pas seulement facile à construire malgré ses lignes raffinées; il est aussi bien conçu pour son emploi, l'observation. Sur les avions d'observation dessinés avant la guerre ou tout au début, le pilotes est à l'arrière et l'observateur devant lui dans un habitacle étriqué d'ou, d'ailleurs on ne voit pas très bien le sol. Au départ l'observateur était une pièce rapportée, placée le plus près possible du centre de gravité comme les charges variables ( essence ou bombes ) Sur l'Aviatik C.1 du musée de Bruxelles que nous restaurons, l'observateur était à l'avant et on peut remarquer que deux pivots pour son unique mitrailleuse ( priorité à l'essence et au bombes ) avait été fixés de part et d'autre de son habitacle pour défendre le secteur latéral et arrière de l'avion, un coup à gauche, un coup à droite. ÇA n'était certainement pas très efficace.
Ici , au contraire, le fuselage à été pensé pour l'observateur en priorité. Son poste, derrière celui du pilote, est le plus vaste pour pouvoir manipuler sans gêne appareil photo, cartes et carnets de notes, à l'abri du plus violant courant d'air. Ce poste, entouré par le rail du support de mitrailleuse, constitue une tourelle aux angles de tir bien dégagés. Enfin il contient un poste de radio pour communiquer avec le sol ( pour éviter le parasitage de l'électricité statique, le fuselage et les ailes sont métallisés avec de fin câbles métalliques courant autour ). Nous avons placé un lecteur de carte sur le dos du fuselage, en arrière de la tourelle, mais ceci était un bricolage propre à certains équipages et, en tout cas, à celui dont nous avons copié la machine.
Pour le reste le LVG demeurait moyennement manœuvrant, à l'instar de presque tous les avions dévolus aux missions d'observations et de bombardement; il était surtout fait pour voler en ligne droite stabilisée. Ses capacités de défenses était donc limités contre plusieurs chasseurs conjuguant leur attaque. Cette carence des biplaces explique pourquoi certains pilotes de chasse particulièrement doués ont pu totaliser des palmarès impressionnants en quelques mois...
J'ai gardé le meilleur pour la fin question pilotage pointu...
Le Blériot XI-2, biplace militaire Français de 1913, moteur rotatif Gnome de 80 ch
Ce biplace directement dérivé du monoplan qui traversa la Manche en juillet 1909 fut armé à partir de 1912. Il était en fin de carrière lorsque la guerre éclata. Il dota la BI 3, la troisième escadrille , future escadrille des Cigognes. Il n'avait pas été conçu pour emporter de mitrailleuse, ni même de bombes qu'il emporta, plaquées sur les flancs. Mais, dès l'ouverture du conflit, l'armée considéra qu'il devait être urgemment remplacé.
Son pilotage très particulier est typique des débuts de l'aviation. Ça sort véritablement de l'ordinaire ! L'avion est agréable, même s'il est peu manœuvrant; il est très sensible à la direction, très lent, pas très puissant, mais ses 80 ch sont suffisants. Il vole bien ... mais uniquement quand les conditions sont bonnes, c'est à dire pas temps calme. Le gauchissement impose des gestes d'une grande amplitude bien qu'il ne se passe presque rien, si bien qu'en air turbulent le Blériot est très délicat !
Il est difficile d'exprimer par des mots cette expérience très particulière... Par exemple , en vol, il ne faut pas regarder derrière soi parce que les torsions de la cellule ont de quoi faire peur. En début de virage, la queue se déplace d'abord, avant les ailes ! Mais ça tient ! Si l'on va trop vite la queue se soulève; c'est l'inverse sur nos avions modernes ! Ce comportement, commun à beaucoup d'aéroplanes d'avant 1914, est dû à l'empennage horizontal porteur: plus l'avion va vite, plus il pique du nez, plus il accélère et pique encore plus, jusqu'au crash. Ce genre d'accident était classique malheureusement. Comme beaucoup de ses contemporains, le Blériot n'est stable que sur une petite plage de vitesse. La marge est faible. Il vole très bien dans son tout petit domaine de vol. En dehors, il est dangereux: plus vite, il pique et accélère, plus lentement, il cabre et ralentit.
Vidéo du Blériot XI-2
Abord du Blériot XI-2
Ces caractéristiques- que je n'appellerai pas des défauts - procurent à ces avions une forte personnalités qui s'estompe avec l'évolution de l'aviation, et , au-delà de tous commentaires qui peuvent être faits avec plus ou moins de pertinence sur le comportement de ces premiers avions d'arme, pour nous Mémorial Flight, les faire voler est un privilège, un honneur... Un rêve exaucé ! Pour d'autres ce rêve est le "Spitfire"...
Pour nous ce sont ces moteurs presque centenaires et ces cellules d'un autre temps.
Fin
Récit fort intéressant sur le comportement de ces avions et la manière de les piloter.
L'association Mémorial Flight est l'une des rares dans le monde à faire voler des avions de la premières Guerre Mondiale ou leurs copies. Voici, tirée de son expérience, quelques esquisses de ces machines pour tracer un portrait des débuts de l'aviation de combat. De la plupart de ceux-ci, la mémoire retient généralement la légende; mais la mémoire fait souvent défaut...
Cette aviation là est à redécouvrir !
Alain Vallet, cofondateur et président de l'association.
L'association possède une bonne idée des qualités de vol de ces avions et de leur comportement en combat. Cependant, avant d'aborder le sujet, Mr Vallet met en garde contre toute mauvaise interprétation:
" Nous ne devons pas porter de jugement de valeur. Nous avons tous une expérience que les équipages et les ingénieurs de l’époque n’avaient pas. Inversement, ils savaient maîtriser des phénomènes que nous avons oubliés. Leurs références n’étaient absolument pas les notres. A l’époque ils ne connaissaient que ces avions rien d’autre .Nous ne pouvons pas ressentir ce que ressentaient les pilotes de l’époque, parce que notre formation, nos connaissances, sont différentes. Ils nous faut considérer que ces avions là c’est simplement un autre monde par rapport à la chasse-, d’autres sensation, un autre inconfort, un pilotage qui n’existe plus et qui était celui des premiers avions d’armes. En 1914, on ne volait pas comme aujourd’hui ou il convient de réduire les risques et de simplifier le pilotage ; on ne comptait pas trop les vies. Ces avions ont été conçus dans ce contexte avec des mentalités très différentes des nôtres.
La conduite des moteurs, à l’exception des rotatifs, n’est pas fondamentalement différente de celle des moteurs à pistons modernes (manette de gaz et manette de mélange ), malgré la magnéto de départ et le réglage de l’allumage de certains mais leur usage présente plus de limites. Par exemple, en cas d’accélération négative, assez fréquente en combat, le risque d’arrêt est élevé. Des pilotes étaient souvent contraints de s’éloigner d’une mêlée pour remettre en route en piquant- encore que sur le Spad, l’Hyspano-Suiza surcomprimé est quasiment impossible à relancer en vol (dixit le manuel ! ) ; Et, quand ils revenaient, souvent le ciel était vide !
Les caractéristiques générales que l’on peut dégager du pilotage de ces avions la grande hétérogénéité des commandes, l’importance des effets secondaires, des couples de renversement et du gouvernail, tout à fait primordial ; le gouvernail de direction est la commande principale sur tous ces avions à cause d’un manque d’efficacité général des commandes de roulis (par ailerons ou pars gauchissement de la voilure ). C’est un pilotage « tout au pied « avec des commandes sans homogénéité (y compris d’un avion à l’autre).
Ces avions ne sont pas stables au sens ou nous l’entendons ; il faut les tenir en permanence. La stabilité d’un avion dit « stable » de 1917 est une catastrophe par rapport à un avion de 1990. Cette complexité explique pourquoi la formation des pilotes pendant la première guerre mondiale était lente et compliquée avec plusieurs types d’avions et …plus de pertes parmi les élèves qu’il n’y en avait au combat (source : les accidents dans la RAF 1917-1918)
Le Spad XIII, moteur Hispano-Suiza 8be, V8 sur-comprimé de 220 ch par Baptiste Salis
Pas facile de monter dans cette avion, car le premier étrier est assez haut. On s'agrippe au mâts pour se hisser de l’étrier au marchepied sur le pot d'échappement. La cabine est très étroite; un grand comme moi ( 1.90 ), doit se contorsionner pour y rentrer après avoir posé les deux pied sur le siège, puis , une fois assis, se plier pour abriter sa tête du courant d'air- même si le petit saut-vent est efficace. Un grand se penche pour voir le compte-tour de gauche,un peu avancé, et lire pressions d'huiles et d'essence. Mais il ne peut pas lire le badin qui est trop en retrait.
La position des jambes est un peu bizzare, du fait du mouvement du palonnier, avec le moteur entre les pieds. Au dessus de chaque pied se trouve les magnéto; on les entend bien tourner quand le moteurs est en marche ! La mise en route est un peu particulière car le moteur Hispano est puissant avec énormément de compression et est réducté. L'hélice est lancée en sens inverse, pour rebondir sur la compression précédente. Le pilote doit être bien coordonné avec le lanceur de l'hélice pour activer de la main droite la petite manivelle de la magnéto de départ au moment ou l'hélice rebondit.
Il est la parfaite illustration du manque d'homogénéité des commandes des avions de cette guerre: une direction qu'on ne sent pas , quelle que soit la vitesse; une profondeur douce. Le couple de l'hélice est aussi très important: au décollage, il est primordial de maîtriser l'avion dans les 10 à 20 premiers mètres de sa course, sinon ...Mais, une fois en ligne de vol, la machine accélérant, c'est fini; elle part bien droit et décolle très vite.
Au roulage l'avion est très lourd de l'arrière avec une béquille fixe. Avec la puissance on arrive à faire des zigzags, mais pour le demi-tour, il faut se faire aider. Comme ce moteur Hispano est réducté, il faut qu'il reste en charge en permanence, et on évite le tout réduit. Mais il est très réactif: quand on avance la manette de gaz, la réponse est immédiate et brutale. Un vrai coup de pied dans le c...! Je ne connais rien d'équivalent , même dans les avions modernes. On met donc la puissance doucement au décollage, pour garder le contrôle et contrer le couple, car la gouverne de direction est un peu petite, mais très vite le moteur s'échappe.
Cette avion est très dur au commandes sur tous les axes. en vol, il faut bien anticiper , car une fois qu'il est inscrit dans sa trajectoire , il est vraiment ancré dedans. Il fend l'air comme une balle ! Dans les passages on doit atteindre 350- 400 km/h. Le plus étonnant est qu'il ne produit pas plus de bruits aérodynamiques et ne vibre pas plus quand il accélère, malgré la profusion de haubans.
Les commandes sont dures partout; pour la profondeur passe encore mais les ailerons sont très vite en béton.L'avion est peu manœuvrant et n'est pas fait pour le combat tournoyant. Juste une passe bien préparée, bien ajustée, et un dégagement pleine vitesse ! La visibilité vers l'avant n'est bonne que quand on pique vers l'objectif. Sinon , on ne voit que sur les cotés.
A l'atterrissage, seul la vision périphérique est utile. A l'arrondie, le pilote ne voit rien et exécutes "de tête" en quelque sorte. Il ne faut pas croire qu'il soit plus simple de se poser queue haute car, si c'est plus facile jusqu'au toucher des roues, ensuite l'empennage n'étant plus soufflé, l'avion n'a pas de freins part dans tous les sens. ce n'est pas forcément méchant , mais c'est incontrôlable. Le manuel de vol exige donc un atterrissage trois points. C'est pour éviter les accidents plus que pour réduire la longueur de l'atterrissage qu'un arret rapide était exigé, même si sur les champs d'aviation il y avait de la place. Ainsi les béquilles étaient généralement munies d'une lame métalliques qui s'enfonçait dans la terre. En fin de guerre, certains avions allemands ont été équipés d'un levier pour abaisser des crocs qui se fichaient dans le sol.
En vol, s'il va vite( +de 200 km/h), le Spad est plus stable que ses contemporains. C'est une très bonne plateforme de tir, bien que, même dans ces conditions, le tir demeure très instinctif et ne porte qu'a très courte distance. Le tir au canon ( sans l'aide du radar bien sur!) exige toujours ces qualité, mais c'était encore plus valable en 1914 quand les vitesses étaient faibles et le taux de montée misérables. De ce fait, l'approche de l'adversaire pouvait être très longue. Il était très important de savoir se placer et de connaitre à fond les capacités de son avion en raison de son manque relatif de puissance pour récupérer une interception manquée ou s'échapper en piqué plein gaz... sauf abord d'un Spad. Cet avion à atteint en piqué sans dommage 450 km/h ( le badin du Spad n'était gradué que jusque là! ) Il était le seul qui offrait la possibilité d'engager à volonté, grâce à sa vitesse élevée, même s'il n'était pas le plus grand manouvrier.
Le Spad est une bête ! Un avion agressif dans son image comme dans comportement, inconfortable, plaçant son pilote dans un puissant courant d'air permanent, chargé d'odeurs d'huiles et d'essence avec des magnétos entre les molets qu'il faut tenir inconfortablement écartés; ils n'offre une visibilité qui n'est bonne que vers le haut, les cotés et vers l'arrière, et partout ailleurs très mauvaise, comme s'il fallait qu'il absorbe son pilote à l'intérieur de son fuselage.
Puissant, rapide, le Spad est plus intercepteur que chasseur. Tout le contraire du Fokker DVII.
Vidéo Spad XIII
Le Fokker D.VIIF, moteur BMW IIIa, 6 cylindres de 185 ch par Edmond Salis:
Le Fokker D.VII a garder à travers les décennies une réputation terrible, puisque c'est le seul avion allemand spécifiquement mentionné dans le traité de Versailles qui scellait la fin de la Première guerre mondiales. Mais comparé au Spad il n'est pas survitaminé ! Il est sauvé par son profil de voilure épais qui élargit considérablement son domaine de vol en lui donnant la possibilité d'évoluer avec des angles d'incidence interdits à ses concurrents. Il est en outre confortable , c'est même un vrai salon ! Sa stabilité est bonne et sa manœuvrabilité plutôt convenable, mais ses commandes restent assez lourdes. A 1200 tours en ligne droite, il est placide; il ne révèle sa nature de chasseur qu'en haut régime vers 1300 à 1350 tours. Ce sont les derniers chevaux qui comptent et changent un avion...
Il faut véritablement escalader le D.VIIF pour monter à son bord, si on empreinte le chemin traditionnel de l'étrier et du marchepied. Donc un petit escabeau est tout aussi bien ! Le poste de pilotage est très spacieux et l'ergonomie très correcte. Le démarrage du moteur repose sur un savant dosage du mélange air essence, le geste du lanceur et la bonne coordination avec le pilote qui actionne la magnéto de démarrage.
A l'arrière la béquille est fixe, ce qui rend le roulage difficile, surtout quand il y a du vent, car l'avion lui offre beaucoup de prise. La visibilité vers l'avant est nul, mais en penchant la tête sur le coté on y voit suffisamment; le mieux est quand même d'avoir des aides pour assurer que la voie est bien dégagée. Néanmoins il est très difficile de faire des S.
Le moteur déborde d'énergie, mais reste souple. Le décollage est impressionnant, car le moteur emmène l'avion très vivement. Mais comment la gouverne de direction est de bonne taille et bien soufflée, le DVII reste contrôlable sans trop de problème. Il accélère très fort quand le moteur passe 1100tr/min- un peu comme un Pitts. Les commandes sont très homogènes sans être légères, et se manoeuvrent avec un débattement normal. En vol , le DVII est stable, s'inscrit bien dans ces trajectoires et y reste. son pilotage est assez intuitif; il suffit de visualiser la trajectoire pour qu'il la suive, sans que le pilote ait à faire d'action hors normes. Les effets du moteur se font sentir, mais ne nécessitent pas de grosses actions pour corriger. De temps à autre, dans les hauts régimes, il lâche une bouffée de fumée noire qu'on voit bien passer à droite- la sortie de l'échappement est à un petit mètre du poste de pilotage. Quand on pousse sur le manche, le DVII accélère fort, sans geindre ni siffler.
Pour le poser, je favorise l'encadrement [ atterrissage gaz réduits ou moteur coupé ], en gardant néanmoins un filet de moteur. Il faut faire attention à ne pas arrondir trop haut, car le train est assez souple et l'avion rebondit facilement. AU roulage, il faut veiler à garder le gouvernail soufflé pour lui redonner de l'efficacité sinon, à basse vitesse, on n'a plus de défense?
Vidéo Fokker DVIIf
Le SE-5a, moteur Hispano-Suiza 8b de 180 ch par Baptiste Salis
Le SE-5A est l'avion le plus facile de notre flotte. Pour autant sont pilotages ne correspond pas à celui des avions modernes. C'est à part...Pas plus compliqué, non, mais autre chose, une autre façon d'anticiper, avec beaucoup d'effet secondaires . Le plus compliqués et dangereux était le changement du chargeur de la mitrailleuse posée sur l'aile: faire basculer l'arme devant soi, enlever le chargeur, le poser sur ses cuisses, prendre le chargeur plein, le mettre en place, armer, ramener l'arme en position, ranger le chargeur vide... Le tout en tenant le manche entre les genoux. La manœuvre complète demandait moins de 20 secondes. Cela paraît peu, mais c'est largement suffisant pour se faire descendre sans pouvoir se défendre !
Monter dans le SE-5a est, comparativement aux autres, très facile. Il suffit d'utiliser le marche pied. Le trou d'homme est plus étroit, mais le poste de pilotage est bien plus large. Le tableau de bord est très lisible, beaucoup plus moderne que ceux du Morane AI et du Spad, plus proche de ce que nous connaissons aujourd'hui. L'avion est équipé d'un compensateur de profondeur qui ajuste l’orientation du plan fixe; il faut penser à le régler, sinon l'avion devient désagréable à piloter dans certaines configurations.
La mise en route est facile et aisée. on lance l'hélice sur le rebond, comme sur le Spad. La différence est que la magnéto de démarrage est fixé à l'extérieur du fuselage ; il faut donc passer le bras par-dessus le bord du poste de pilotage pour l'atteindre. Le moteur est souple, car il n'est pas réducté comme celui du Spad. La visibilité est assez bonne, comparativement au autre avions du Mémorial Flight, même si ce type de vision vers l'avant a de quoi effrayer le pilote qui ne connait que des avions plus modernes.
Au roulage , son patin orientable est conjugué au palonnier: (voir photo ci-contre)
En vol, la seul chose vraiment notable est que le SE-56a beaucoup de roulis induit. Dès qu'on entre dans le virage, il s'incline de plus en plus et il faut mettre le manche dans le sens opposé. Toutefois, les amplitudes d'action sur le manche ne sont pas très grandes, mais les ailerons sont un peu mous. Les actions sur les commandes sont assez homogènes sur les trois axes, ce qui rappelle énormément le " Tiger Moth"
Le SE-5a ne vole pas très vite comparé aux autres, mais, dès qu'il accélère, on est averti car ses haubans se mettent à siffler ! A l'atterrissage , je choisis une approche de type planeur, avec une pente assez forte et le moteur à bas régime- mais pas réduit.
Vidéo SE5a
Le Fokker DRI, à moteur rotatif Clerget français de 130 ch en lieu et place de l'Oberursel de 110 ch de base par Edmond Salis
Pour monter dans un DR.I, il faut être jeune et souple ! Le moteur de celui de Mémorial Flight est un Clerget rotatif, comme celui du Morane AI. Ce n'est pas une incongruité car les pilotes allemands, peu satisfait par l'Oberursel de 110 ch qui motorisait l'avion en Allemagne, se jetaient sur le Clerget dès que qu'ils pouvaient en récupérer un sur un avion allié capturé. Un des triplans pilotés par Joseph Jacobs était équipé d'un moteur et d'une hélice provenant d'un " Camel " britannique posé derrière les lignes allemandes. Le Clerget de 130 ch était réputé supérieur à tous les autres moteurs rotatifs simplement concurrencés par le Bentley.
Même procédure de démarrage et même odeur entêtante d'huile de ricin, même problème de ralenti au roulage. Du fait de l'aile médiane, on ne voit absolument rien devant, rien de rien, encore moins que sur les autres ! Au décollage, on ne voit devant qu'an ligne de vol. Mais il ne faut pas pousser sur le manche trop tôt, sinon on accentue les effets gyroscopiques.
Les commandes sont efficaces, notamment les ailerons, avec des débattements assez faibles. La particularité de cette avion est qu'il est très instable, tout le temps. La bille se balance en permanence. En ligne de vol, on y voit un peu mieux vers l'avant; cependant en vol de groupe, il faut être très attentif car les angles morts sont nombreux. La manœuvrabilité le rapproche du Morane AI, mais son extrême instabilité n'incite pas à aller jouer dans les coins. L'atterrissage présente les mêmes difficultés que les autres.
Le Fokker triplan que Manfred von Richthofen fit rentrer dans la légende était agile, mais pas assez puissant et trop lent... Bref il n'était pas à la hauteur de sa terrible réputation ! Le DR.I avait aussi la réputation d'être un excellent grimpeur, Oui, il monte bien... mais pas longtemps. Sa ressource est très courte- une centaine de mètres - parce qu'il manque de puisssance. C'est pour cela que ses pilotes recherchaient les rotatifs Clerget, plus fiables et plus musclés que les rotatifs allemands. La notoriété de cet appareil, construit à 320 exemplaires, est principalement due au fait que Manfred von Richthofen fut tué à bord de l'un d'eux. Le triplan Sopwith qui était un bien meilleur appareil est resté quasi inconnu du grand public. Quand à la grande maniabilité du DR.I, elle est inférieur à celle du Morane-Saunier AI, qui, dans ce domaine, devait être le nec plus ultra de son temps.
Vidéo Fokker DRI
Le Morane Saulnier AI, moteur Clerget rotatif de 130 ch par Baptiste Salis
Le Morane Saulnier AI, dont l’insuccès demeure mystérieux. Son principal défaut était son moteur rotatif qui lui retirait la possibilité d'opérer à haute altitude et pouvait le limiter en vitesse. Malheureusement il avait été conçu autour de ce type de moteur.
Il a pratiquement les mêmes dimensions que le Spad XIII. là aussi, il est bien pratique d'avoir des grandes jambes pour monter à bord. Il est particulièrement difficile de mettre le pied dans l'étrier, car comme le fuselage est de section ronde et que cet étrier est fixé pratiquement en dessous, il faudrait, pour bien faire, avoir le genou articulé à l'envers ! On agrippe la poignée sur le flanc du trou d'homme et le haut des mâts. Puis on enjambes et on pose les deux pieds sur le siège pour ensuite se couler dans l'habitacle. Celui-ci est assez spacieux pour un grand de 1.90 m. Le pare-brise remonte suffisamment haut, la position du manche est agréable.
Il n'y a pas d'indicateur de vitesse. Le moteur est un Clerget rotatif - la "Rolls" des rotatifs. Sa mise en route ne repose que sur le lanceur, il n'y a pas de magnéto de départ. La préparation consiste soit à injecter de l'essence directement dans les cylindres avec une burette, par la soupape d'échappement, soit à faire pisser un filet d'essence par le frein filtre, qous le moteur, puis à régler la manette de gaz avant que le lanceur brasse de façon énergique. On entend alors très nettement le moteur aspirer l'essence; le bruit de succion est net. Puis on le lance dans le sens de la rotation et il démarre superbement bien. la particularité de ces moteurs est le Tampier: il ne s'agit pas d'un carburateur à proprement parler, du type comme à flotteur, mais d'un système de guillotine avec des peits gicleurs qui nécessite un ajustement quasi-permanent de la mixture en fonction des gaz. Pratiquement à chaque action de la manette des gaz, il faut réajuster la mixture, sauf quand on est dans la zone de plein gaz. Bien sûr, dès que le moteur est lancé, on est enveloppé par l'odeur de l'huile de ricin- mais pas aspergé car les capots qui recueillent
l' huile giclant des échappements sont bien construits.
Au roulage , on ne voit rien devant; l'avion est très cabré. Le train est souple, les amortisseurs ont tendance à faire sauter l'avion si te terrain est trop cahoteux. Le problème du roulage est que les rotatifs sont difficiles à tenir au ralenti, et s'encrassent vite. Donc il faut procéder par coups de gaz.
Au décollage plein gaz; il a beaucoup de couple ( pas autant que le Spad ), et il faut enfoncer le palonnier du coté opposé. Ce couple se fait également fortement sentir dans les montées. L'étonnant avec cette avion est qu'il ne faut pas chercher à tenir la bille au milieu dans les virages car alors il vole bizarrement, en dérapant. Ses commandes sont extraordinnaires, montées sur roulements, très douce sur tout les axes à toutes les vitesses - elles peuvent être comparées à celles di Bücker " Jungmeinster" qui est la référence absolue en la matière. De plus les ailerons possèdent des oreilles de compensation aux extrémité, ce qui procure une forme d'assistance.
Par rapport au Spad, qui est très stable l'AI est instable. Il se prête parfaitement à la voltige, aux évolutions très serrées, donc au combats tournoyant. Il tourne littéralement sur le bout de sont aile, dans un mouchoir de poche et reste agréable au basse vitesses. Je ne connais aucun avions qui tourne plus serrés que lui... même le "Jungmeister" ! L' AI à vraiment été conçu pour la maniabilité avec des commandes rigides montées sur roulement à bille . Du haut de gamme ! Il tourne très bien un tonneau... Ce n'est plus du tout le Spad ou l'on entend les commandes d'ailerons couiner et grincer quand on est encore au sol. Au contraire, l'AI est très agréable à piloter, mais son problème est son moteur rotatif qui limite considérablement son plafond. Il est parfait en basse altitude, mais, en 1917, le moteur Hispano- Suiza amenait assez facilement un Spad à 6000 m, et l'on savait depuis les débuts de la chasse que l'avantage de l'altitude était un facteur extrêment important dans la réussite d'un combat.
Cette avion a été, très peu utilisé, dans trois escadrilles seulement, puis réparti en petites quantités dans un petit nombre d'unités, pour le plus grand plaisir des pilotes qui pouvaient profiter de ses qualités en toutes quiétude hors des combats. Son manche est incliné de 15° vers l'avant. C'est une particularité commune à la plupart des avions de combat de 14-18 pour cette raison qu'il fallait plus de débattement pour cabrer que pour piquer, principalement lors de l'atterissage.
Pour le poser, l'approche peut être celle du Pitts, en glissade, avec posé trois-points. Surtout ne pas toucher de l'arrière d'abord, sinon c'est immédiatement le cheval de bois !
Vidéo Morane Saulnier AI
Le Sopwith 1B2 ( version française du fameux biplace 1 1/2 "Strutte" britannique), moteur rotatif Clerget de 130 ch ( en cours de restauration pour remise en état de vol )
Le Sopwith "1 1/2 Strutter" désigné 1B2 en France, fut commandé pour remplacer les avions à moteurs arrière, en attendant le Bréguet XIV. Il n'emportait que 60 kg de bombes.
Le Sopwith 1B2 de 1916 est un avion beaucoup plus moderne (en comparaison au Blériot XI-2 de 1913). IL a été le premier à être muni de "frein sur l'air" ou de "frein à air"... Comprenez aérofreins. Toutefois, il est écrit dans le manuel de pilotage que leur usage est réservé à des pilotes confirmés. En lisant entre les lignes, on comprend que c'était à un coup, destiné à arrêter l'avion en 20 m lors d'un atterrissage imprévu, avec une descente en très forte pente qui, à mon avis équivalait à un crash contrôlé. Par contre, le plan fixe de l'empennage horizontal était réglable en vol, un mécanisme très rare à l'époque, propres à certains avions britanniques... et aux avions convenablement équilibrés. Malheureusement, le Sopwith était trop stable et manœuvrait très mal... Nous avons volé sur une réplique de ce Sopwith aux Etats-Unis, motorisée avec un Gnome rotatif. Elle était très stable, très douce. Vous la mettiez en virage, elle y restait... Un pilotage pas pointu du tout pour l'époque, mais des capacités de manoeuvre à peu près nulles. Une vrai cible ! Un cercueil volant ! D' ou des noms de baptême comme: " Qu'est ce qu'on rigole " ou " Pourvu que ça dur" . Or à cette époque, le biplace était une cible privilégiée pour les chasseurs; c'est lui qui portait les bombes ou qui observait les positions des troupes au sol pour renseigner les états-major, et la vocations des chasseurs était de protéger le biplace ami ou d'interdire l'aviation de reconnaissance ou de bombardement ennemie.
Le RAF Be-2, moteur RAF 4a de 90 ch, dérivé britannique amélioré d'un V8 Renault de 80 ch, refroidi par air.
Le Be2 a précédé le Sopwith et en a aussi été le contemporain. Il est l'exemple même de l'avion qui ne peut pas évoler malgré une succession d'améliorations. Typiquement anglais, ça, je plaisante ! : un concept de base sans cesse modifié.
Le Be2 est laid, bizarrement dessiné avec un fuselage en poutre rectangulaire carénée uniquement autour de son équipage. l'observateur est à l'avant dans un habitacle trop étroit avec des bidouilles pour pouvoir utiliser une mitrailleuse en défense par dessus la tête du pilote ! Mais cela lui confère une personnalité certaine, le charme fou d'un avion très désuet.
Au départ c'était un concept d'avant-guerre sans empennage vertical fixe. A suivi le Be2C avec une petite dérive. Elle n'a pas donné de résultat et a été remplacé par une plus grande... en vain. Par conséquent, on a ajouté quelques mètres à l'envergure de son aile supérieure, puis on a sorti le Be12 plus puissant... Tout a été tenté pour le rendre efficace: observation, puis bombardement et chasse de nuit, toujours sans grand résultat.
J'ai eu le privilège de voler sur l'un d'eux en Nouvelle-Zélande. Le manche à balais est très long pour donner au pilote un bras de levier maximal. Malgré ça, il faut le tenir à deux mains- raison pour laquelle la commande de gaz est placée sur le manche-, cette commande demeure très lourde mais , en roulis, n'a pas d'effet s fantastiques, et le compensateur à ressorts de la profondeur est réglable au pied. Sur le Be2F, la surface des ailerons a été nettement augmentée sans que cela y change grand-chose. L'avion évolue donc très mal bien qu'il soit docile, plutôt sympathique. Il n'avait aucune chance contre un chasseur arrivant par dessous. Trop mauvais en combat aérien, il a fini comme bombardier de nuit. Le notre sera ainsi présenté.
Construction d'un LVG C.VI ( Luftverkehrs Gesellschaft ), moteur Benz Bz IV de 230 ch et projet d'un Aviatik C.1, moteur Mercedes de 160 ch
Le LVG C.VI, résume à lui seul tous les progrès accomplis par l'aéronautique en quatre ans. Il n'est pas seulement facile à construire malgré ses lignes raffinées; il est aussi bien conçu pour son emploi, l'observation. Sur les avions d'observation dessinés avant la guerre ou tout au début, le pilotes est à l'arrière et l'observateur devant lui dans un habitacle étriqué d'ou, d'ailleurs on ne voit pas très bien le sol. Au départ l'observateur était une pièce rapportée, placée le plus près possible du centre de gravité comme les charges variables ( essence ou bombes ) Sur l'Aviatik C.1 du musée de Bruxelles que nous restaurons, l'observateur était à l'avant et on peut remarquer que deux pivots pour son unique mitrailleuse ( priorité à l'essence et au bombes ) avait été fixés de part et d'autre de son habitacle pour défendre le secteur latéral et arrière de l'avion, un coup à gauche, un coup à droite. ÇA n'était certainement pas très efficace.
Ici , au contraire, le fuselage à été pensé pour l'observateur en priorité. Son poste, derrière celui du pilote, est le plus vaste pour pouvoir manipuler sans gêne appareil photo, cartes et carnets de notes, à l'abri du plus violant courant d'air. Ce poste, entouré par le rail du support de mitrailleuse, constitue une tourelle aux angles de tir bien dégagés. Enfin il contient un poste de radio pour communiquer avec le sol ( pour éviter le parasitage de l'électricité statique, le fuselage et les ailes sont métallisés avec de fin câbles métalliques courant autour ). Nous avons placé un lecteur de carte sur le dos du fuselage, en arrière de la tourelle, mais ceci était un bricolage propre à certains équipages et, en tout cas, à celui dont nous avons copié la machine.
Pour le reste le LVG demeurait moyennement manœuvrant, à l'instar de presque tous les avions dévolus aux missions d'observations et de bombardement; il était surtout fait pour voler en ligne droite stabilisée. Ses capacités de défenses était donc limités contre plusieurs chasseurs conjuguant leur attaque. Cette carence des biplaces explique pourquoi certains pilotes de chasse particulièrement doués ont pu totaliser des palmarès impressionnants en quelques mois...
J'ai gardé le meilleur pour la fin question pilotage pointu...
Le Blériot XI-2, biplace militaire Français de 1913, moteur rotatif Gnome de 80 ch
Ce biplace directement dérivé du monoplan qui traversa la Manche en juillet 1909 fut armé à partir de 1912. Il était en fin de carrière lorsque la guerre éclata. Il dota la BI 3, la troisième escadrille , future escadrille des Cigognes. Il n'avait pas été conçu pour emporter de mitrailleuse, ni même de bombes qu'il emporta, plaquées sur les flancs. Mais, dès l'ouverture du conflit, l'armée considéra qu'il devait être urgemment remplacé.
Son pilotage très particulier est typique des débuts de l'aviation. Ça sort véritablement de l'ordinaire ! L'avion est agréable, même s'il est peu manœuvrant; il est très sensible à la direction, très lent, pas très puissant, mais ses 80 ch sont suffisants. Il vole bien ... mais uniquement quand les conditions sont bonnes, c'est à dire pas temps calme. Le gauchissement impose des gestes d'une grande amplitude bien qu'il ne se passe presque rien, si bien qu'en air turbulent le Blériot est très délicat !
Il est difficile d'exprimer par des mots cette expérience très particulière... Par exemple , en vol, il ne faut pas regarder derrière soi parce que les torsions de la cellule ont de quoi faire peur. En début de virage, la queue se déplace d'abord, avant les ailes ! Mais ça tient ! Si l'on va trop vite la queue se soulève; c'est l'inverse sur nos avions modernes ! Ce comportement, commun à beaucoup d'aéroplanes d'avant 1914, est dû à l'empennage horizontal porteur: plus l'avion va vite, plus il pique du nez, plus il accélère et pique encore plus, jusqu'au crash. Ce genre d'accident était classique malheureusement. Comme beaucoup de ses contemporains, le Blériot n'est stable que sur une petite plage de vitesse. La marge est faible. Il vole très bien dans son tout petit domaine de vol. En dehors, il est dangereux: plus vite, il pique et accélère, plus lentement, il cabre et ralentit.
Vidéo du Blériot XI-2
Abord du Blériot XI-2
Ces caractéristiques- que je n'appellerai pas des défauts - procurent à ces avions une forte personnalités qui s'estompe avec l'évolution de l'aviation, et , au-delà de tous commentaires qui peuvent être faits avec plus ou moins de pertinence sur le comportement de ces premiers avions d'arme, pour nous Mémorial Flight, les faire voler est un privilège, un honneur... Un rêve exaucé ! Pour d'autres ce rêve est le "Spitfire"...
Pour nous ce sont ces moteurs presque centenaires et ces cellules d'un autre temps.
Fin