PARIS (AFP) - Des pilotes d'Air France sont incités à prendre des photos en plein vol, pour alimenter un site internet, y compris après avoir décollé ou avant d'atterrir, ont révélé deux syndicats qui s'inquiètent des conséquences d'une telle initiative pour la sécurité.
"Le personnel naviguant en fonction à bord est instamment invité à prendre des photographies aériennes et ce, dans toutes les phases du vol sans aucune exclusion des phases critiques", ont dénoncé les syndicats de pilotes Alter et SPAF (minoritaires).
"Cette incitation figure sur le site Internet de la division A320, http://www.a320af.com, propriété de la société Air France", ont précisé ces syndicats dans une lettre adressée mardi à Jean-Cyril Spinetta, PDG de la compagnie.
"Il ne s'agit pas d'un site officiel d'Air France. C'est une initiative individuelle que nous désapprouvons totalement", a au contraire indiqué la direction de la communication d'Air France, en refusant de confirmer ou d'infirmer le fait que des pilotes ont pris les photos en ligne.
"On n'appuie pas sur un déclencheur d'appareil photo quand on est censé tenir les commandes d'un avion", a déclaré Gérard Marquaille, président du Syndicat des pilotes d'Air France (SPAF). D'après lui, le site web en question "est un site dont le nom de domaine est propriété d'Air France".
Ce site a été fermé mardi soir. "Le site est fermé", a confirmé une porte-parole de la compagnie, en refusant de dire si Air France était à l'origine de cette fermeture.
Certains clichés "sont pris dans les toutes dernières secondes précédant l'atterrissage. L'encadrement va jusqu'à souhaiter recueillir des clichés pris à l'occasion de survols de pays dont la législation proscrit, sous peine de sanction, de telles pratiques", affirme le courrier dont l'AFP a obtenu une copie. "Il est incompréhensible qu'un comportement aussi irresponsable ait pu voir le jour et ce, à des niveaux élevés de la hiérarchie", dénoncent les syndicats, qui devaient diffuser des tracts à leurs collègues.
Un pilote d'Air France a commenté pour l'AFP, sous couvert d'anonymat, des photos mises sur le site. Désignant un cliché, il a dit: "Cette photo a été prise à 740 pieds, c'est-à-dire à environ 200 mètres d'altitude. Est-ce que franchement le commandant de bord n'a pas autre chose à faire?" "Si à ce moment-là, il reçoit un ordre de remise de gaz ou s'il y a une rafale de vent, il fait quoi ? Quand on pense qu'on poursuit les gens parce qu'ils téléphonent au volant", s'est-il exclamé. "Quand on est en train de décoller un avion, le job n'est pas de prendre des photos. C'est la loi: elle nous interdit de faire quoi que ce soit d'autre, dans une phase de décollage ou d'atterrissage".
Des constats d'huissier ont été réalisés à la demande des syndicats, qui ont également annoncé qu'ils vont saisir le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) du personnel navigant et le Bureau enquête accidents (BEA).
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