Pour répondre globalement à chacun :
A l’approche, l’avion tient la vitesse minimale définie par les procédures (ici de l’US Navy) en fonction de certains paramètres… Cette vitesse n’étant pas élevée, dans la plage d’incidence autorisée, l’assiette est généralement positive (nez en l’air) et importante, ce qui signifie que sur un plan d’approche normal d’environ 5%, le pilote ne peut pas voir avec beaucoup de précision le point d’impact de la trajectoire sur la piste, donc se dire s’il va accrocher tel ou tel brin. Donc, il ne vise aucun point de la piste, il ne le peut pas.
Il est donc assisté par le miroir d’appontage et le LSO, car le point d’impact de la crosse sur le pont est un carré de 12 m sur 12m (distance entre les brins 2 et 3). Ce pilote suit les indications du miroir et les instructions du LSO, qui lui, anticipe les déviations de trajectoire du pilote. Si tout se passe bien (il n’y a pas d’arrondi), le train principal et la crosse touchent le pont au bon endroit et il y a arrêt.
Garrison explique que le pilote remet plein gaz un peu avant que le train ait touché le pont (inertie des moteurs à enrouler en régime/retard de poussée).
Si tout se passe mal (trop long), il y a impact, et ça repart, les manettes étant déjà en butée avant depuis au moins 1 à 2 secondes (c’est long quand on a besoin de puissance en urgence).
En fait on se met en cas de pire situation par anticipation.
Sans l’aide au minimum du miroir d’appontage il serait impossible d’amener l’avion sur la piste avec une précision de 12 m. (Exemple me concernant : en instruction, il m’arrive avec des élèves qui sont au dessus de la moyenne du point de vue dextérité au pilotage, d’effectuer des approches sur C152 (pas d’autres appareils car trop délicats) à 38 kts, au second régime. Bien sûr par vent nul. L’assiette de l’avion est à cabrer et forte (on ne voit pas l’entrée de piste), la trajectoire est contrôlée aux gaz et non plus au manche, et la vitesse est contrôlée au manche et non plus au gaz comme cela se fait habituellement sur ce type d’avion. Le plan d'approche est évalué par vision latéral. Par contre la vitesse est tellement basse que l’on peut se poser sur un point précis sans problème. Comme il n’est pas possible de voir devant… on est obligé de regarder sur le côté. Malgré ça, on n'arrive qu’à une précision de ~10 m si on ne triche pas (évidemment on ne fait pas d’arrondi car l’avion a déjà son assiette correspondant à celle de l’arrondi/tricher veut dire descendre volontairement sous le plan d’approche normal à 20 ou 30 m du seuil et ajouter de la puissance afin de ‘traîner’ l’avion jusqu’au point d’impact – là on arrive à 90% à toucher là où il faut). Avec un miroir d’appontage je pense qu’on pourrait toucher pile un point marqué sur la piste à coup sûr vu les 38 kts du Cessna – j’en toucherai un mot au commandant de l’aérodrome -
).
Sur LOMAC et autres simus, il est vrai que sans miroir et/ou réticule ‘vecteur vitesse’, ça reste Hard…
Lorsque l’avion est à l’atterrissage i.e au toucher des roues (après arrondi), l’assiette est à cabrer (nez en l’air). C’est le train principal qui sert à absorber l’energie à l’impact et non pas le train avant (qui reste fragile).
A l’appontage, comme l’assiette à cabrer est forte, il n’y a pas vraiment besoin d’arrondir pour lever encore plus le nez et modifier la trajectoire (l ‘allonger), donc risquer de rater le brin 3. L’avion touche sur le train principal dans la position (l’assiette) qu’il a prise durant toute l’approche. Evidemment c’est assez brutal mais jusqu’ici on ne sait pas faire mieux (on renforce donc ce train et la partie de structure qui reprend les efforts).
Dans le cas où un pilote fait 1, 2… bolter (trop long), sous le stress, il va chercher la solution de facilité. S’il ne voit pas la piste pour accrocher correctement un brin… il va finir par pousser sur le manche afin de voir la zone de touchdown et espérer accrocher un brin… pousser sur le manche signifie baisser le nez, signifie amener le train avant fragile en contact avec le pont, signifie redonner de l’énergie, de la vitesse… en final, une probabilité de crash élevée… destruction matériel, perte vies humaines, arrêt des opérations de la mission…
J’aurais du le préciser : Au cours de la guerre du Vietnam, un pilote qui pitch-down (pousse sur le manche) une fois hérite d’un avertissement, au deuxième c’est la court martiale. En période de paix, les règles sont peut-être plus souples.
L’US Navy considérait ce fait comme une faute professionnelle grave.
Elle préférait une éjection du pilote dans de bonnes conditions et la perte d’un appareil plutôt qu’un crash avec possibilité de destruction du bâtiment par incendie, explosion des armements stockés etc… ne pas oublier que le feu à bord d’un navire est une véritable hantise.
J’avais eu l’occasion à plusieurs reprises il y a un peu plus de 10 ans, de survoler (passer pas loin) des PA US ancrés dans la baie de Cannes sur le cheminement à vue entre Cannes et Nice à 500 ft.
Le choc de ma vie : un navire de 350m vu comme ça ressemble à une maquette en plastique… minuscule. Il faut imaginer que le pilote ‘vise’ une piste qui fait les 2/3 de la longueur totale du navire, et que sur cette piste, il doit ‘impacter’ sur une zone de 36 m… à faire peur ! Respect, comme vous dites !
***