Page 45 sur 56

Publié : lun. juil. 09, 2012 8:06 pm
par Azrayen
Allez zou, histoire de... (et comme promis + haut)

Rapport final du BEA (extrait)
3.2 Causes de l’accident
L’obturation des sondes Pitot par cristaux de glace en croisière était un phénomène connu mais mal maîtrisé par la communauté aéronautique à l’époque de l’accident. D’un point de vue opérationnel, la perte totale des informations anémométriques qui en résulte était une défaillance répertoriée dans le modèle de sécurité. Après des réactions initiales relevant du « basic airmanship », elle était censée être diagnostiquée par les pilotes et gérée si besoin par des mesures conservatoires sur l’assiette et la poussée indiquées dans la procédure associée.
La survenue de la panne dans le contexte du vol en croisière a totalement surpris les pilotes du vol AF 447. Les apparentes difficultés de pilotage à haute altitude dans la turbulence ont entraîné un sur-pilotage en roulis et une brusque action à cabrer de la part du PF. La déstabilisation résultante de la trajectoire ascendante et l’évolution de l’assiette et de la vitesse verticale se sont dès lors ajoutées aux indications de vitesse erronées et à des messages ECAM n’aidant pas au diagnostic. L’équipage, progressivement déstructuré, n’a vraisemblablement jamais compris qu’il était confronté à une « simple » perte des trois sources anémométriques.

Dans la minute suivant la déconnexion du pilote automatique, l’échec des tentatives de compréhension de la situation et la déstructuration de la coopération de l’équipage se nourrissent l’un l’autre jusqu’à la perte totale du contrôle cognitif de la situation. Les hypothèses comportementales sous-jacentes au classement comme « majeure » de la perte des informations anémométriques ne sont pas vérifiées dans le contexte de l’accident. La confirmation de ce classement suppose donc un travail complémentaire de retour d’expérience opérationnel permettant de faire évoluer si besoin la formation des équipages, l’ergonomie des informations qui leur sont présentées et la conception des procédures.
L’avion est entré dans un décrochage prononcé, annoncé par l’alarme de décrochage et un fort buffet. Malgré ces symptômes persistants, l’équipage n’a jamais compris qu’il décrochait et en conséquence jamais appliqué de manœuvre de récupération.
L’association de la réalisation ergonomique de l’alarme, des conditions dans lesquelles les pilotes de ligne sont formés et exposés au décrochage dans leur apprentissage professionnel, et du processus de maintien des compétences, ne génère pas les comportements attendus avec une fiabilité acceptable.
Dans son état actuel, la reconnaissance de l’alarme de décrochage, même associée au buffet, suppose que l’équipage attribue à l’alarme une « légitimité » minimum. Ceci suppose à son tour une expérience préalable suffisante du décrochage, un minimum de disponibilité cognitive et de compréhension de la situation, et de connaissance de l’avion (et de ses modes de protection) et de sa physique du vol. L’examen de la formation actuelle des pilotes de ligne ne permet pas de trouver en général une trace convaincante de la construction et du maintien des compétences associées.
Plus généralement, le double échec des réponses procédurales prévues montre les limites du modèle de sécurité actuel. Lorsqu’une action de l’équipage est attendue, il est toujours supposé qu’il aura une capacité de maîtrise initiale de la trajectoire et de diagnostic rapide permettant d’identifier la bonne entrée dans le dictionnaire de procédures. Un équipage peut être confronté à une situation imprévue entraînant une perte momentanée mais profonde de compréhension. Si, dans ce cas, les capacités supposées de maîtrise initiale puis de diagnostic sont perdues, alors le modèle de sécurité se retrouve en « défaut de mode commun ». Lors de cet événement, l’incapacité à maîtriser initialement la trajectoire a aussi rendu impossible la compréhension de la situation et l’accès à la solution prévue.

Ainsi, l’accident résulte de la succession des événements suivants :
  • l’incohérence temporaire entre les vitesses mesurées, vraisemblablement à la suite de l’obstruction des sondes Pitot par des cristaux de glace ayant entraîné notamment la déconnexion du pilote automatique et le passage en loi alternate ;
  • les actions inappropriées sur les commandes déstabilisant la trajectoire ;
  • l’absence de lien, de la part de l’équipage, entre la perte des vitesses annoncée et la procédure adaptée ;
  • l’identification tardive par le PNF de l’écart de trajectoire et la correction insuffisante par le PF ;
  • la non-identification par l’équipage de l’approche du décrochage, l’absence de réaction immédiate et la sortie du domaine de vol ;
  • l’absence de diagnostic de la part de l’équipage de la situation de décrochage et en conséquence l’absence d’actions permettant de la récupérer.
Ces événements peuvent trouver leurs explications dans la combinaison des facteurs suivants :
  • les mécanismes de retour d’expérience de l’ensemble des acteurs qui n’ont pas permis :
    • de détecter la non-application récurrente de la procédure relative aux pertes d’informations de vitesses et d’y remédier,
    • de s’assurer que le modèle de risque des équipages en croisière comprenait le givrage des sondes Pitot et ses conséquences ;
  • l’absence d’entraînement, à haute altitude, au pilotage manuel et à la procédure « vol avec IAS douteuse » ;
  • un travail en équipage affaibli par :
    • l’incompréhension de la situation à la déconnexion du PA,
    • une mauvaise gestion de l’effet de surprise qui a engendré une charge émotionnelle élevée pour les deux copilotes ;
  • l’absence d’indication claire dans le poste de pilotage de l’incohérence des vitesses identifiée par les calculateurs ;
  • la non-prise en compte de l’alarme de décrochage par l’équipage pouvant être la conséquence :
    • de l’absence d’identification de l’alarme sonore, en conséquence de la faible exposition en formation au phénomène de décrochage, à l’alarme STALL et au buffet,
    • de l’apparition au début de l’événement d’alarmes furtives pouvant être
      considérées comme non pertinentes,
    • de l’absence d’information visuelle permettant de confirmer l’approche du
      décrochage après la perte des vitesses caractéristiques,
    • de la confusion possible avec une situation de survitesse dont le buffet est également considéré comme un symptôme,
    • des indications des directeurs de vol pouvant conforter l’équipage dans ses actions, bien qu’inappropriées,
    • de la difficulté à reconnaître et comprendre les implications d’une
      reconfiguration en loi alternate sans aucune protection en incidence.

Publié : lun. juil. 09, 2012 8:09 pm
par Azrayen
Allez zou, histoire de... (et comme promis + haut)

Rapport final du BEA (extrait)
3.2 Causes de l’accident

L’obturation des sondes Pitot par cristaux de glace en croisière était un phénomène connu mais mal maîtrisé par la communauté aéronautique à l’époque de l’accident. D’un point de vue opérationnel, la perte totale des informations anémométriques qui en résulte était une défaillance répertoriée dans le modèle de sécurité. Après des réactions initiales relevant du « basic airmanship », elle était censée être diagnostiquée par les pilotes et gérée si besoin par des mesures conservatoires sur l’assiette et la poussée indiquées dans la procédure associée.
La survenue de la panne dans le contexte du vol en croisière a totalement surpris les pilotes du vol AF 447. Les apparentes difficultés de pilotage à haute altitude dans la turbulence ont entraîné un sur-pilotage en roulis et une brusque action à cabrer de la part du PF. La déstabilisation résultante de la trajectoire ascendante et l’évolution de l’assiette et de la vitesse verticale se sont dès lors ajoutées aux indications de vitesse erronées et à des messages ECAM n’aidant pas au diagnostic. L’équipage, progressivement déstructuré, n’a vraisemblablement jamais compris qu’il était confronté à une « simple » perte des trois sources anémométriques.

Dans la minute suivant la déconnexion du pilote automatique, l’échec des tentatives de compréhension de la situation et la déstructuration de la coopération de l’équipage se nourrissent l’un l’autre jusqu’à la perte totale du contrôle cognitif de la situation. Les hypothèses comportementales sous-jacentes au classement comme « majeure » de la perte des informations anémométriques ne sont pas vérifiées dans le contexte de l’accident. La confirmation de ce classement suppose donc un travail complémentaire de retour d’expérience opérationnel permettant de faire évoluer si besoin la formation des équipages, l’ergonomie des informations qui leur sont présentées et la conception des procédures.
L’avion est entré dans un décrochage prononcé, annoncé par l’alarme de décrochage et un fort buffet. Malgré ces symptômes persistants, l’équipage n’a jamais compris qu’il décrochait et en conséquence jamais appliqué de manœuvre de récupération.
L’association de la réalisation ergonomique de l’alarme, des conditions dans lesquelles les pilotes de ligne sont formés et exposés au décrochage dans leur apprentissage professionnel, et du processus de maintien des compétences, ne génère pas les comportements attendus avec une fiabilité acceptable.
Dans son état actuel, la reconnaissance de l’alarme de décrochage, même associée au buffet, suppose que l’équipage attribue à l’alarme une « légitimité » minimum. Ceci suppose à son tour une expérience préalable suffisante du décrochage, un minimum de disponibilité cognitive et de compréhension de la situation, et de connaissance de l’avion (et de ses modes de protection) et de sa physique du vol. L’examen de la formation actuelle des pilotes de ligne ne permet pas de trouver en général une trace convaincante de la construction et du maintien des compétences associées.
Plus généralement, le double échec des réponses procédurales prévues montre les limites du modèle de sécurité actuel. Lorsqu’une action de l’équipage est attendue, il est toujours supposé qu’il aura une capacité de maîtrise initiale de la trajectoire et de diagnostic rapide permettant d’identifier la bonne entrée dans le dictionnaire de procédures. Un équipage peut être confronté à une situation imprévue entraînant une perte momentanée mais profonde de compréhension. Si, dans ce cas, les capacités supposées de maîtrise initiale puis de diagnostic sont perdues, alors le modèle de sécurité se retrouve en « défaut de mode commun ». Lors de cet événement, l’incapacité à maîtriser initialement la trajectoire a aussi rendu impossible la compréhension de la situation et l’accès à la solution prévue.

Ainsi, l’accident résulte de la succession des événements suivants :
  • l’incohérence temporaire entre les vitesses mesurées, vraisemblablement à la suite de l’obstruction des sondes Pitot par des cristaux de glace ayant entraîné notamment la déconnexion du pilote automatique et le passage en loi alternate ;
  • les actions inappropriées sur les commandes déstabilisant la trajectoire ;
  • l’absence de lien, de la part de l’équipage, entre la perte des vitesses annoncée et la procédure adaptée ;
  • l’identification tardive par le PNF de l’écart de trajectoire et la correction insuffisante par le PF ;
  • la non-identification par l’équipage de l’approche du décrochage, l’absence de réaction immédiate et la sortie du domaine de vol ;
  • l’absence de diagnostic de la part de l’équipage de la situation de décrochage et en conséquence l’absence d’actions permettant de la récupérer.
Ces événements peuvent trouver leurs explications dans la combinaison des facteurs suivants :
  • les mécanismes de retour d’expérience de l’ensemble des acteurs qui n’ont pas permis :
    • de détecter la non-application récurrente de la procédure relative aux pertes d’informations de vitesses et d’y remédier,
    • de s’assurer que le modèle de risque des équipages en croisière comprenait le givrage des sondes Pitot et ses conséquences ;
  • l’absence d’entraînement, à haute altitude, au pilotage manuel et à la procédure « vol avec IAS douteuse » ;
  • un travail en équipage affaibli par :
    • l’incompréhension de la situation à la déconnexion du PA,
    • une mauvaise gestion de l’effet de surprise qui a engendré une charge émotionnelle élevée pour les deux copilotes ;
  • l’absence d’indication claire dans le poste de pilotage de l’incohérence des vitesses identifiée par les calculateurs ;
  • la non-prise en compte de l’alarme de décrochage par l’équipage pouvant être la conséquence :
    • de l’absence d’identification de l’alarme sonore, en conséquence de la faible exposition en formation au phénomène de décrochage, à l’alarme STALL et au buffet,
    • de l’apparition au début de l’événement d’alarmes furtives pouvant être
      considérées comme non pertinentes,
    • de l’absence d’information visuelle permettant de confirmer l’approche du
      décrochage après la perte des vitesses caractéristiques,
    • de la confusion possible avec une situation de survitesse dont le buffet est également considéré comme un symptôme,
    • des indications des directeurs de vol pouvant conforter l’équipage dans ses actions, bien qu’inappropriées,
    • de la difficulté à reconnaître et comprendre les implications d’une
      reconfiguration en loi alternate sans aucune protection en incidence.

Publié : lun. juil. 09, 2012 8:33 pm
par TooCool_12f
SpruceGoose a écrit :A quoi bon étant donné que les ordinateurs de bord protègent l'avion dans son enveloppe de vol et qu'il ne peut donc pas en théorie entrer dans le domaine du décrochage.

Et puis si tu mets un système stick shaker, tu dois ajouter un système stick pusher.

Et franchement, je n'aimerai pas que ce stick pusher soit commandé par... un ordinateur de bord.

* * *
euh, j epense que ceramix pensait plus à une alarme "double input", pas à un "retour de force façon joystick sur ordi"...

en gros, tu agis sur le manche, celui-ci vibre (costaud la vibration, histoire que tu ne puisses pas ne pas la remarquer) et tu sais que vous êtes deux à bricoler le bordel.. en soi, l’implémentation serait relativement simple, puisqu'il s'agirait d'un circuit "on-off", si les deux manches enregistrent une action en même temps: bzzzzzttt!!!!

rien de plus

Publié : lun. juil. 09, 2012 8:48 pm
par SpruceGoose
TooCool_12f a écrit :euh, j epense que ceramix pensait plus à ...
rien de plus
Ah, OK ! :innocent:

* * *

Publié : lun. juil. 09, 2012 10:18 pm
par larsenjp
Ouais, le BEA a fait son travail et plutôt bien je pense.

Ce qui m'avait vraiment frappé lors de la publication des conversations cockpit est qu'à aucun moment le mot "décrochage" n'est prononcé alors que l'alarme stall retentit. En fait la situation de décrochage n'est même pas évoquée ; par contre, un des trois, le PF je crois, évoque un piqué en survitesse, c'est à dire exactement la situation inverse de la réalité.
Et pourtant le PF en question a maintenu son stick à cabrer pendant la presque totalité de la durée du drame (si je me souviens bien de ce que j'avais lu) ; dans ces conditions comment a-t-il pu penser qu'il était en piqué en survitesse plutôt qu'en décrochage (surtout avec l'alarme stall derrière)? J'avoue que j'ai un peu de mal à comprendre même s'il est clair que le malheureux n'a pas dû beaucoup être exposé à la situation de décrochage lors de sa formation comme le dit si bien le BEA.

Publié : mar. juil. 10, 2012 8:24 pm
par greg765
larsenjp a écrit :
Ce qui m'avait vraiment frappé lors de la publication des conversations cockpit est qu'à aucun moment le mot "décrochage" n'est prononcé alors que l'alarme stall retentit. En fait la situation de décrochage n'est même pas évoquée ; par contre, un des trois, le PF je crois, évoque un piqué en survitesse, c'est à dire exactement la situation inverse de la réalité.
Et pourtant le PF en question a maintenu son stick à cabrer pendant la presque totalité de la durée du drame (si je me souviens bien de ce que j'avais lu) ; dans ces conditions comment a-t-il pu penser qu'il était en piqué en survitesse plutôt qu'en décrochage (surtout avec l'alarme stall derrière)? J'avoue que j'ai un peu de mal à comprendre même s'il est clair que le malheureux n'a pas dû beaucoup être exposé à la situation de décrochage lors de sa formation comme le dit si bien le BEA.
Je n'ai pas encore fini de lire le rapport, donc désolé si je dis des bourdes.

Mais étant donné la situation, il faut prendre en compte le facteur humain :

Il est TRÈS FRÉQUENT, dans les crashs aériens, que le pilote se RACCROCHE A UNE IDÉE, même si plusieurs éléments concordent pour dire qu'elle est fausse.

Le pilote s'est mis en tête le piqué en survitesse, le reste est "un problème de facteurs humains".

Après tout, l'alarme de décrochage n'est pas aussi fiable que si tout l'avion fonctionnait bien : ils ont eu plusieurs alarmes incohérentes entre elles, montrant qu'une partie d'entre elles n'étaient pas fiables. Ils sont probablement restés bloqués mentalement sur le piqué, en oubliant probablement la deuxième hypothèse, exclue directement par leur esprit.

Publié : mar. juil. 10, 2012 10:15 pm
par lancaster
Ben moi quand je lis le rapport y'a pas 36.000 interprétation! Les pilotes ont tunnelisé comme on dit dans le jargon et jusqu'à l'impact sans jamais rien comprendre à une situation qui sur le papier n'avait rien de dramatique.
Maintenant c'est clair aussi que cette tunnelisation trouve son origine dans l'inexpérience et le manque flagrant de formation!!!
On le sait l'élément le plus défaillant d'un aéronef c'est son équipage, les conclusions d'enquêtes sont sans appel, dans plus de 80% des cas c'est nous qui merdons, nous somme humains c'est tous. La seul raison qui justifie encore notre présence dans le cockpit, c'est notre intelligence qui nous rend seul apte à gérer les cas non conforme pour lesquels l'ordi n'est pas programmé. Seulement aujourd'hui la formation des pilotes fait un peu l'impasse sur ce côté "intelligence de situation"!!!

Publié : mar. juil. 10, 2012 11:03 pm
par pOy-yOq
En tout cas la recommandation d'étudier la possibilité de montrer au cockpit et donc d'utiliser la valeur de l'incidence de l'avion est plus que bienvenue.
Je ne comprends pas pourquoi cette indication n'est pas plus généralisée et utilisée (en aviation de loisir et pro, je crois que c'est utilisé en militaire ?).
Cette mesure est fiable, bien plus rapide qu'un anémomètre et indépendante de la masse contrairement aux vitesses d'approches.

De plus, elle reste adaptée au vol croisière haute altitude où l'avion est proche de son incidence de décrochage.

Si les pilotes avaient su qu'ils avaient en permanence plus de 35° d'incidence ils auraient probablement tout de suite pris conscience qu'ils étaient en situation de décrochage.

Publié : mar. juil. 10, 2012 11:44 pm
par pOy-yOq
lancaster a écrit :On le sait l'élément le plus défaillant d'un aéronef c'est son équipage, les conclusions d'enquêtes sont sans appel, dans plus de 80% des cas c'est nous qui merdons, nous somme humains c'est tous. La seul raison qui justifie encore notre présence dans le cockpit, c'est notre intelligence qui nous rend seul apte à gérer les cas non conforme pour lesquels l'ordi n'est pas programmé. Seulement aujourd'hui la formation des pilotes fait un peu l'impasse sur ce côté "intelligence de situation"!!!
Tiens, par hasard comme tu sembles particulièrement bien renseigné : aurais-tu les statistiques des équipages qui ont sauvé des avions parce que l'informatique ou un/des systèmes avait merdé ?

Bizarrement les reproches sont souvent à sens unique...

Publié : mer. juil. 11, 2012 9:39 am
par ceramix
"
1.16.8.4 Témoignages d’autres équipages confrontés à des situations similaires
L’analyse comparative de comptes-rendus et témoignages d’équipages effectuée à
partir de dix-sept événements survenus dans des conditions similaires à celles de
l’AF 447, dont ceux étudiés en 1.16.2, a permis de dégager des tendances :
ˆˆ l’analyse de la situation par les équipages semble difficile ;
ˆˆ l’appel de la procédure unreliable airspeed est rare ;
ˆˆ certains équipages évoquent la difficulté de choisir une procédure compte tenu
de la situation (nombreuses alarmes) ;
ˆˆ d’autres ne voient pas l’utilité d’appliquer cette procédure dans la mesure où, en
l’absence de doute sur l’incohérence des vitesses, leur interprétation du titre de
la procédure « IAS douteuse » ne les amène pas à l’appliquer ;
ˆˆ certains donnent la priorité au contrôle de l’assiette longitudinale et de la poussée
avant d’entreprendre quoi que ce soit ;
ˆˆ le déclenchement de l’alarme STALL est perçu. Elle surprend et de nombreux
équipages ont tendance à la considérer comme incohérente."

vu de loin ça a tourné au crash pour eux mais ça aurait pu arriver à d'autres.

Publié : mer. juil. 11, 2012 11:46 am
par Azrayen
greg765 a écrit :Après tout, l'alarme de décrochage n'est pas aussi fiable que si tout l'avion fonctionnait bien : ils ont eu plusieurs alarmes incohérentes entre elles, montrant qu'une partie d'entre elles n'étaient pas fiables.
Heu, attention à la formulation. :sweatdrop

1/ Les alarmes ont été multiples, mais globalement cohérentes. La seule "incohérence" est que la mesure de l'incidence (source de l'alarme de décrochage) est invalidé en deçà d'une certaine vitesse air, permettant d'écrire l'équation : si V<60kts, alors SW=off. Cette "incohérence" est survenue assez tard dans le scénario, et n'explique pas pourquoi l'avion s'est retrouvé dans la situation de décrochage franc/maintenu.

2/ Il a en revanche sans doute "manqué" une alarme, qui aurait indiqué explicitement à l'équipage la source de toutes les autres (initialement, en tout cas). Le BEA juge ainsi que faire apparaitre un message : "Incohérence de vitesses donc A/P OFF, A/THR OFF, bidule FAIL, machin LOST..." serait plus pertinent que juste les conséquences (A/P OFF, A/THR OFF, bidule FAIL, machin LOST...)
L'équipage a en effet détecté la perte des indications de vitesse, mais face aux alarmes induites n'a pas poursuivi dans la logique prévue pour ce type d’évènement.


-----------


ceramix : C'est ça.


++
Az'

Publié : mer. juil. 11, 2012 1:44 pm
par larsenjp
Je crois me souvenir avoir lu que les vitesses étaient revenues assez rapidement (peut-être pas toutes?) et qu'elles donnaient une indication fiable mais l'équipage n'a pas su ou pu utiliser cette information.

Je n'avais pas lu le §1.16.8.4 mais ça fait peur; la recommandation du BEA prend toute sa valeur dans ce contexte. C'est étonnant que cela n'ait pas été fait avant.

Rétrospectivement on peut se dire que les efforts faits pour aller chercher l'avion valaient le coup. Sinon, on en serait toujours réduit à des hypothèses avec la possibilité que ce scénario se reproduise.

Publié : mer. juil. 11, 2012 9:34 pm
par Balto
Az : je n'ai rien contre airfrance ou airbus ni contre toi hein.


Bon alors j'ai retrouve le soit disant reportage :whistlingmais ils ont coupé le journaliste qui fait le lancement et qui conclue mais il avait terminé par les phrases écrites a coté de la video :

1- des erreurs humaines
2- defaillance matos
3- formation indaptée (là est ecrit procédure inadaptée mais le journaliste avait parlé de formation)

Image

http://www.bfmtv.com/vol-rio-paris-l-en ... 30206.html


Sinon je ne voit pas les choses comme toi Az :
Les alarmes ont été multiples, mais globalement cohérentes. La seule "incohérence" est que
Une alarme qui arrete de sonner quand il faut pas et reprend quand il faudrait pas tu appelle ca quelquechose de globalement coherent ?lol
On sait tous les deux qu elle n'a pas
permis de remplir son office
, ce pourquoi elle a été inventée et instalée :
informer l equipage que l avion est en decrochage.


En résumé :
l'avion est indecrochable si on tout un tas de conditions qui peuvent pourtant se produire sont respectées
L'alarme est globalement coherente excepté le detail qui a fait qu un equipage complet n'a rien compris à ce qui se passait.

Ah bah oui tout va bien en fait...

ca me fait penser à un de mes neveux :
"c'est pas moi qui ai cassé le verre c est ma main"lol




Sinon ok je comprend pour le simulateur de vol qui ne peut pas simuler des choses car airbus n'a pas pu tester le 'decrochage' et enregistrer des données.
On peut se demander d ailleurs comment fait boeing ? ils ne peuvent pas non plus tester le decrochage alors ?

Publié : mer. juil. 11, 2012 10:24 pm
par ceramix
ça n'arrive pas que sur Airbus (2 accidents de 757 en 96), la moité des recommandations pour l'AF447 pourraient être des copié/collé d'il y a 15 ans.

Publié : jeu. juil. 12, 2012 1:15 am
par Azrayen
Balto a écrit :Az : je n'ai rien contre airfrance ou airbus ni contre toi hein.
OK :)
Balto a écrit :Bon alors j'ai retrouve le soit disant reportage :whistling .
Merci pour le lien. :yes: Dans la vidéo, ça cause de rapport du BEA alors que le texte à côté (qui à priori te choque) porte sur le rapport judiciaire. Je n'ai pas connaissance du détail du second.
Concernant la vidéo, je dirais qu'il y a tous les mots, mais pas forcément dans le bon sens : les liens "logiques" (le rapport pointe ceci, et d'ailleurs exemple cela) ne sont pas toujours pertinents. Plus la présence de Monsieur Gérard Arnoux, au parti-pris notoire. Bref : trop rapide, mal compris, pas grand intérêt.
Balto a écrit :Sinon je ne voit pas les choses comme toi Az :
Les alarmes ont été multiples, mais globalement cohérentes. La seule "incohérence" est que
Une alarme qui arrete de sonner quand il faut pas et reprend quand il faudrait pas tu appelle ca quelquechose de globalement coherent ?lol
Ne me fais pas dire autre chose que ce que j'écrivais STP :innocent:
En réponse à greg765 "ils ont eu plusieurs alarmes incohérentes entre elles" je réagissais en disant : "globalement cohérentes". Et je maintiens :
- alarme déconnexion A/P : cohérente
- A/THR lost + THR LK : cohérent
- ALT LAW (PROT LOST) + reconfiguration des PFD : cohérents
- alarme déviation d'altitude : cohérente
- ... etc.

La seule "incohérence" est liée à l'alarme décrochage. Ce n'est pas une "petite" incohérence, hein, mais pour autant elle est liée à une alarme, pas à plusieurs.
D'autre part elle est incohérente dans "un seul sens" : dixit le BEA, elle était justifiée (cohérente avec la situation) chaque fois qu'elle s'est déclenchée. Bon, le pb c'est qu'elle a arrêté de sonner alors qu'elle n'aurait pas dû = incohérence.
Balto a écrit :On sait tous les deux qu elle n'a pas
permis de remplir son office
, ce pourquoi elle a été inventée et instalée :
informer l equipage que l avion est en decrochage.
Pas d'accord avec ta formulation (que je lis comme un truc absolu, valable "sans réserve").
Je serais d'accord si tu avais écrit "elle n'a pas toujours rempli son office".
Ou même, encore mieux (IMO) : "Au bout de 54 secondes continues pendant lesquelles elle a rempli son office sans pour autant que l'équipage ne réagisse explicitement ni n'engage de manœuvre appropriée, l'alarme décrochage a cessé de remplir son office et cette incohérence a pu ajouter à la confusion de l'équipage."
Pourquoi est-ce que j'insiste ? Parce que le fait que l'alarme se soit tue (*) n'est pas la cause de la non réaction au décrochage de l'équipage d'AF447. Il faut chercher ailleurs dans un but de prévention d'accidents futurs :
- modification de la manière dont l'alarme agit (ajout d'un canal visuel et/ou tactile à l'actuel canal sonore)
- formation renforcée afin que l'alarme, si perçue, soit "crue" et que la procédure associée (corrigée) soit respectée.
- ...

(*) alors qu'elle n'aurait pas dû, ceci doit être corrigé, on est d'accord (c'est une reco, d'ailleurs).
Balto a écrit :En résumé :
l'avion est indecrochable si on tout un tas de conditions qui peuvent pourtant se produire sont respectées
L'alarme est globalement coherente excepté le detail qui a fait qu un equipage complet n'a rien compris à ce qui se passait.

Ah bah oui tout va bien en fait...
  • L'avion est indécrochable tant qu'il est en loi normale. Point. Ce n'est pas difficile à comprendre, ni à retenir, surtout quand on est qualifié sur la machine (et qu'on doit donc connaitre son outil de travail). Si on n'y arrive pas, c'est qu'on n'est pas à sa place.
  • L'alarme décrochage... cf plus haut. ;)
Est-ce que tout va bien ? Non. Est-ce que l'avion ne devrait pas subir des corrections ? Si, bien sûr (**).
Est-ce que les pilotes ont merdé ? Oui. Est-ce que leur formation ne devrait pas être revue ? Si, bien sûr.
Inutile d'en "rajouter" dans un sens ou dans l'autre. Le rapport du BEA me parait équilibré. :yes:

(**) A ce sujet il y a d'autres aspects que ceux cités dans les derniers posts qui sont plus importants/urgents IMO : le Flight Director, la non indication de l'UAS par le système (alors que détecté...). A côté, la (non) alarme décrochage sous 60kts parait relativement secondaire, nonobstant son poids médiatique ;)
Balto a écrit :Sinon ok je comprend pour le simulateur de vol qui ne peut pas simuler des choses car airbus n'a pas pu tester le 'decrochage' et enregistrer des données.
On peut se demander d ailleurs comment fait boeing ? ils ne peuvent pas non plus tester le decrochage alors ?
A ma connaissance, Boeing, Bombardier, ATR, Embraer... sont dans la même situation qu'Airbus, effectivement. :sweatdrop


++
Az'

Publié : jeu. juil. 12, 2012 4:37 pm
par rollnloop
L'avion est indécrochable tant qu'il est en loi normale. Point. Ce n'est pas difficile à comprendre, ni à retenir, surtout quand on est qualifié sur la machine (et qu'on doit donc connaitre son outil de travail). Si on n'y arrive pas, c'est qu'on n'est pas à sa place.
Commercialement c'est vendeur, mais c'est hélas faux. Aucun avion n'est indécrochable, y compris un Airbus en loi Normale. Trouve moi un airbus assuré contre la casse, deux parachutes, et je te fais la démo.

Publié : jeu. juil. 12, 2012 4:52 pm
par firag
et tu feras quoi exactement comme manoeuvres ?

Publié : jeu. juil. 12, 2012 5:04 pm
par ergo
Ahrrrem ... o_O

Le principe même de la loi normal c'est de maintenir l'avion dans ses paramètres de vols.

Si pour une raison X ou Y tu arrives en loi normal à faire sortir l'avion de ces fameux paramètres .. il n'y a qu'une explication : l'avion n'est plus en loi normal. (Un paramètre l'en a fait sortir).

Le système est plus que fiable, il est tellement exclusif que c'est une obligation.

Alors oui, c'est un peu prendre le problème à l'envers ... mais tu ne trouveras pas un seul cas où tu puisses appliquer la loi normal et faire décrocher l'avion. Maintenant, avoir une alerte bien visible "No normal law" ... c'est typiquement ce que demande le BEA ... pour éviter que les pilotes se disent "pas de soucis, l'avion se pilote".

Ergo.

Publié : jeu. juil. 12, 2012 5:19 pm
par rollnloop
Je t'emmène dès que tu auras trouvé l'airbus et les 2 pépins... et l'avion sera en loi normale jusqu'au décrochage. Quand à la loi dans laquelle il sera après le décrochage...

Publié : jeu. juil. 12, 2012 5:20 pm
par TOPOLO
Pour faire décrocher un chassou 100% protégé en décrochage (genre 2000, Raf...), c'est assez simple, tu le mets à la verticale et tu mets le mache au neutre et le throttle sur Idle...., il y a un moment ou il va décrocher. (le 2000 passe en vitesse négative, genre -100Kts, les Mig-29 aussi), tu peux donc légitimement douter du 100%
(Il est possible qu'il n'y ait pas que ça comme maneuvre)
Je ne sais pas si on peut mettre un A330 à la verticale,(j'ai un doute), mais j'imagine qu'il doit y avoir des manips équivalentes.

Publié : jeu. juil. 12, 2012 5:31 pm
par rollnloop
Le 330 est protégé en assiette en loi normale, donc l'exemple du 2000 est inadapté. Par contre, à l'approche d' alpha max et en mettant plein pot sur un moteur et idle sur l'autre...

Publié : jeu. juil. 12, 2012 5:47 pm
par ergo
Tu vas commander "plein pot" sur l'un et "idle" sur l'autre .. mais sauf erreur en loi normal tu choisis pas le régime moteur .. tu commandes à l'avion qui commande au moteur ce qu'il décide ... non ?

Faudrait que je retrouve la doc sur cette fichu loi !

Publié : jeu. juil. 12, 2012 5:48 pm
par Azrayen
rollnloop a écrit :Commercialement c'est vendeur, mais c'est hélas faux.
Tu chipotes et tu le sais. :innocent:
Pour te faire plaisir, remplace "indécrochable" par "protégé contre le décrochage". :yes:

Ergo : la loi normale est une loi de commandes de vol, pas de lien avec les moteurs.

Je ne sais pas si l'avion (commandes, débattement, surfaces + protections) a une autorité suffisante pour contrer le genre de "manip à la con" présenté par rollnloop, mais il est sûr que les protections CDVE ne t'empêcheront pas de jouer avec les moteurs.

Publié : jeu. juil. 12, 2012 6:07 pm
par rollnloop
ergo a écrit :Tu vas commander "plein pot" sur l'un et "idle" sur l'autre .. mais sauf erreur en loi normal tu choisis pas le régime moteur .. tu commandes à l'avion qui commande au moteur ce qu'il décide ... non ?

Faudrait que je retrouve la doc sur cette fichu loi !
Tu as raison, le moteur souhaité "mort" doit être coupé pour plus de certitude, idle ne suffira peut-être pas, ça dépendra du "dynamisme" de la manoeuvre.

Azrayen a écrit :Tu chipotes et tu le sais. :innocent:
Pour te faire plaisir, remplace "indécrochable" par "protégé contre le décrochage". :yes:
Pour madame michu qui prend les choses au premier degré (et il y a plus de madame michu parmi les pilotes qu'on ne le croit), c'est néanmoins fondamental, désolé pour tes mouches.

Publié : jeu. juil. 12, 2012 8:08 pm
par Azrayen
Ah, mais je ne conteste pas (d'autant que je suis moi-même souvent chipoteur). Je constate :)
Et +1 sur les "Captain Michu". :yes: (très bon, au passage)

Pour le reste, mon propos était de récuser la "complexité" décrite (décriée ?) par Balto quant à la disponibilité (ou non) de la protection hautes incidences.