Article OPEX 360, avec le titre : L’Aviation légère de l’armée de Terre développe le concept de « dronisation de l’aérocombat »
https://www.opex360.com/2024/11/02/lavi ... erocombat/
La généralisation des drones FPV [First Person View] et des munitions téléopérées [MTO] sur les champs de bataille ukrainiens sonne-t-elle le glas pour l’hélicoptère de reconnaissance et d’attaque ? Certains en sont convaincus. Tel est le cas de l’US Army, qui a décidé d’annuler son programme FARA [Future Attack Reconnaissance Aircraft], alors censé lui permettre de remplacer une partie de ses AH-64E Apache et ses OH-58 Kiowa. D’autres invitent à la prudence, estimant que la vérité d’un conflit ne sera pas forcément celle du prochain. Clairement, l’Aviation légère de l’armée de Terre [ALAT] s’inscrit dans cette logique.
D’ailleurs, l’hélicoptère, qu’il soit d’attaque ou de manœuvre, peut très bien cohabiter avec des drones. Tel est le sens du projet européen MUSHER [Manned Unmanned System for HelicopteR], lequel a récemment fait l’objet d’une démonstration pleine de promesses, l’idée étant de faire évoluer des hélicoptères et des drones au sein d’un réseau « Manned-Unmanned Teaming » [MUM-T] unique. Une telle capacité devrait être intégrée à la version Mk2+ du Tigre ainsi qu’au NH-90 Caïman.
Au passage, comme l’a rappelé le général David Cruzille, le commandant de l’Aviation légère de l’armée de Terre [COMALAT], dans un entretien diffusé par le Commandement du combat futur [CCF], la nécessité de développer la coopération entre les hélicoptères et les drones figurait dans les documents de doctrine élaborés il y a déjà 15 ans. « Le drone, aujourd’hui, c’est une belle opportunité. Il y a un tel bond technologique que l’on peut passer de la doctrine à la mise en œuvre », a estimé le général Cruzille. Et il n’est pas question pour l’ALAT de perdre du temps en attendant le développement du « drone parfait ». « Le but n’est pas d’attendre le drone idéal qui fera 100 % de ce qu’on attend de lui. Mais si on a déjà des drones qui peuvent nous apporter deux tiers de ce qu’on attend, alors il faut saisir cette balle », a explique le COMALAT.
Aussi, l’ALAT s’est lancée dans la « dronisation de l’aérocombat », qui est, selon le général Cruzille, une « démarche ambitieuse et assumée ». En clair, il s’agit d’utiliser des drones – disponibles sur le marché – à partir d’un hélicoptère pour « voir et tirer plus loin » ainsi que pour leurrer l’adversaire. Une expérimentation a d’ailleurs récemment été menée à cette fin par le 3e Régiment d’hélicoptères de combat [RHC], un drone FPV ayant été mis en œuvre par un opérateur installé dans la soute d’un hélicoptère de manœuvre.
Plus généralement, il s’agit de développer le concept ELA [engins lancés par aéronef]. « C’est un concept sur lequel travaille l’industrie. Pour faire simple, on peut imaginer qu’un drone puisse être lancé à partir d’un Tigre et qui permette d’observer une zone à 10 ou 20 km » en avant, a expliqué le COMALAT. Il pourrait également être possible de lancer des munitions téléopérées ou des drones chargés de « leurrer l’ennemi en attirant son attention sur une zone où vous n’avez pas l’intention d’aller avec vos hélicoptères », a-t-il ajouté.
Une telle capacité serait également intéressante pour les hélicoptères de manœuvre, comme le NH-90 Caïman, mais aussi pour le H160M « Guépard », le successeur de la Gazelle. Pour ces deux types d’appareils, un opérateur prendrait place dans la soute arrière afin de diriger le drone, ce qui permettrait de ne pas alourdir la charge cognitive de l’équipage.
Mais à plus long terme, c’est-à-dire dans 15 ou 20 ans, l’ALAT espère pouvoir disposer d’un « drone tactique d’aérocombat », performant « au juste niveau » afin qu’il ne soit pas trop coûteux, l’idée étant de gagner de la masse. Cet appareil serait une sorte « d’ailier fidèle » pour l’hélicoptère de combat du futur, dont l’une des principales qualités devra être la « connectivité ». Ce qui, pour l’armée de Terre, permettra d’accélérer la boucle du renseignement tout en renforçant ses capacités en matière de combat collaboratif.