Article OPEX 360, avec le titre : La disponibilité des hélicoptères NH-90 de la Marine et de l’ALAT progresse… mais reste encore insuffisante
« Là où il y a une volonté, il y a un chemin », dit-on. S’agissant de l’hélicoptère NH-90 Caïman NFH [Nato Frigate Helicopter], si la volonté est là, le chemin est toutefois semé d’embûches. Depuis l’entrée en service de cet appareil, en décembre 2011, les chefs d’état-major de la Marine nationale [CEMM] se succèdent et le constat est toujours le même : sa disponibilité demeure insuffisante. S’il avait estimé qu’il était « exceptionnel » et allait « bouleverser la lutte anti-sous-marine », l’amiral Bernard Rogel [CEMM entre 2011 et 2016] avait en effet souligné les « défauts de jeunesse » du NH-90 NFH et mis en avant des problèmes de « corrosion ». Son successeur, l’amiral Christophe Prazuck [2017-2020] ne cacha pas son exaspération devant le faible taux de disponibilité de cet hélicoptère et le coût de son entretien. « Nous y épuisons nos mécaniciens et nos flottilles pour un rendement assez faible », avait-il déploré.
Récemment nommé à la tête de la Marine nationale, l’amiral Pierre Vandier s’était lui aussi plaint de « difficultés considérables » avec les NH-90 de l’Aéronautique navale… Au point que, en octobre 2021, seulement quatre appareils étaient disponibles sur les 26 alors en dotation [le 27e et dernier exemplaire a été livré en décembre 2021, ndlr]. « Nous espérons atteindre dix ou onze d’ici un mois », avait-il alors confié aux sénateurs. Mais, cet objectif ne fut pas atteint, la Direction de la maintenance aéronautique [DMAé] ayant précisé que seulement sept hélicoptères étaient effectivement aptes au service en janvier 2022. « Il ne suffit pas de concevoir, de construire et d’assembler des hélicoptères, car une fois sortis de l’usine encore faut-il les entretenir pour pouvoir les faire voler », s’était agacée Florence Parly, ministre des Armées, à l’époque, en s’adressant à Airbus Helicopters, membre du consortium NHIndustries, mis en place pour la production du NH-90.
Il fut par la suite décidé d’établir une « assistance technique renforcée » sur les bases aéronavales de Lanvéoc et de Hyères afin d’améliorer la disponibilité des NH-90 NFH. Cette mesure a-t-elle été efficace? Il est n’est plus possible d’y répondre, les indicateurs permettant de mesurer les effets du Maintien en condition opérationnelle Aéronautique [MCO-Aéro] étant désormais confidentiels. Cependant, lors des débats sur la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30, l’amiral Vandier avait expliqué qu’un plan d’action proposé par les industriels permettrait de « remonter à douze hélicoptères disponibles pour la fin de l’année prochaine » [soit un taux de disponibilité technique de 44%].
Quoi qu’il en soit, dans leur avis budgétaire sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces », les sénateurs Olivier Cigolotti et Michèle Gréaume, bien que n’étant pas autorisés à évoquer les indicateurs mis sous le boisseau par le ministère des Armées, ont affirmé que la « disponibilité des NH90 en version NFH restait insuffisante » alors que celle des NH-90 en version TTH [Tactical Transport Helicopters] exploités par l’Aviation légère de l’armée de Terre [ALAT] « avait poursuivi sa progression ».
Interrogé sur la disponibilité des aéronefs de l’Aéronautique navale, l’actuel CEMM, l’amiral Nicolas Vaujour, a donné une réponse moins tranchée que ses prédécesseurs au sujet du NH-90 NFH. « La verticalisation [des contrats, comme RAVEL et BOLERO, ndlr] nous a permis d’améliorer sensiblement la disponibilité de la flotte de Rafale Marine et c’est une très bonne chose » mais « c’est plus compliqué pour le NH90, il faut le reconnaître », a-t-il répondu. « Un groupe d’orientation et de décision a été créé avec l’industriel, la Direction générale de l’armement [DGA], la Marine et la DMAé pour trouver les bonnes options et augmenter le taux de disponibilité de cet aéronef. La dynamique semble positive. Cela nécessite un dialogue extrêmement poussé et exigeant avec l’industriel », a-t-il ajouté.
Son homologue de l’armée de Terre [CEMAT], le général Pierre Schill, a également des soucis de disponibilité avec les hélicoptères de l’ALAT, lesquels consomment un tiers de l’enveloppé dédiée à l’Entretien programmé des matériels [EPM] qui lui est allouée. « La disponibilité technique ne constitue pas un critère absolu. Au quotidien, dans la préparation opérationnelle de mes forces, je n’ai pas besoin de la disponibilité de l’ensemble de mes hélicoptères, mais d’un nombre d’heures de vol. Des arbitrages sont opérés sur les crédits qui nous sont donnés entre nombre de machines rendues disponibles, même si elles ne volent pas, et volume d’heures à effectuer concentrées sur un nombre moindre d’hélicoptères employés au maximum de leur potentiel », a expliqué le général Schill, lors de la partie à huis clos d’une audition à l’Assemblée nationale, en octobre [le compte rendu vient d’être publié, ndlr].
Pour le moment, ces arbitrages lui « permettent d’assurer le nombre d’heures de vol nécessaires » pour les équipages de l’ALAT, en particulier dans la « préparation et la conduite des engagements opérationnels ». Cependant, a-t-il poursuivi, « en cas de déploiement massif, il s’agira de disposer de suffisamment de régiments d’hélicoptères de combat » et la « disponibilité devra être maximale ». Aussi, l’ALAT travaille avec les industriels « pour améliorer cette disponibilité technique ». Et, au regard des sommes consenties à cette fin, « Airbus Helicopters doit y contribuer », a dit le général Schill. « Nous réfléchissons notamment à l’augmentation du pas-de-visite des hélicoptères, notamment la flotte NH90 », a-t-il conclu.