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Publié : mer. févr. 04, 2004 9:55 am
par hellflyer
ce texte n'est pas de moi et malheureusement je n'ai pas le nom de l'auteur car l'ayant recu sur mon Email par un copain d'un copain...

===8<==============Original message text===============
22 Novembre 2003, un A 300 modifié « Tout Cargo » exploité par la
Compagnie DHL (indicatif OO DLL) décolle de Bagdad à destination de
Bahreïn. C’est un « bon vieux B 4 », numéro de série 94, initialement
livré à la Compagnie MAS.
A son bord, trois membres d’équipage, Eric le Commandant de bord, son
co-pilote Steve, et l’Officier Mécanicien Navigant Mario. Ils sont prêts

pour cette mission de routine, simple transport de courrier.
La charge transportée est modeste L’étape est courte, le temps est
dégagé et l’avion ne pèse que 220 000 livres, bien en dessous de la
masse maximale autorisée pour l’atterrissage.
Rien ne leur indique qu’ils vont vivre leur « Heure de Vérité » : celle
à laquelle les hommes d’action sont confrontés, un jour ou l’autre,
celle où se révèlent les vrais caractères, loin des simagrées
médiatiques. L’heure que l’on redoute et que l’on espère, car le verdict

est sans appel.

Aligné sur la 15 Gauche, les freins sont lâchés. Les deux moteurs
poussent rapidement l’avion vers un envol sans problème, en
configuration « Becs seuls »
En application de la procédure préconisée par la Compagnie pour
s’éloigner au plus vite du sol, les becs sont rentrés à très basse
altitude et l’avion installé en montée à pente maximale à la vitesse de
215 nœuds.

Le calme est de courte durée. Vers 8000 pieds un choc ébranle l’avion,
associé en quelques secondes à une succession d’alarmes sonores. Mario
annonce la perte des circuits hydrauliques vert et jaune, et vingt
secondes plus tard le circuit bleu perd à son tour sa pression.
L’avion est désormais livré à lui-même. Manche et palonnier sont sans
effet. Les gouvernes, privées de leur muscle hydraulique, s’alignent
dans le lit du vent.

La configuration est figée :

- becs et volets ne peuvent plus sortir,
- les spoilers ne sont plus commandés et s’alignent eux aussi dans le
lit du vent local.
- la position de l’empennage horizontal n’est plus modifiable: Elle est
et restera en fait gelée à la valeur qui était nécessaire pour
équilibrer l’avion à 215 nœuds, à la poussée de montée.

La perte hydraulique totale est rapidement diagnostiquée. L’état
d’urgence est signalé par Steve au Contrôleur ATC. L’équipage est avisé
de l’existence d’un feu externe au niveau de la voilure gauche. L’avion
continue sa montée et sa stabilité l’entraîne en un virage d’inclinaison

modérée à gauche. Une tension extrême règne dans le cockpit, jusqu'à ce
que le Commandant de Bord annonce qu’il pense contrôler l’assiette
longitudinale en jouant sur les moteurs.

Commence alors une période d’apprentissage pendant laquelle Eric, suivi
par Steve, découvre comment maîtriser la pente en modulant la poussée
des moteurs. Au début les actions sur les manettes sont amples et
uniquement symétriques, le virage à gauche est donc maintenu et l’avion
décrit un 360° large et irrégulier.
L’équipage constate qu’il peut certes stopper la montée en réduisant,
mais que cette diminution de poussée entraîne aussi l’augmentation de la

vitesse de vol : il faudra « faire avec » ce paradoxe : Il résulte du
couple piqueur que le blocage du plan horizontal ne peut équilibrer.

Eric demande avec insistance la sortie du train d’atterrissage « à la
manivelle du dernier secours » alors que la vitesse excède déjà 270
nœuds, valeur maximale autorisée pour cette manœuvre. Le train sort
bruyamment et fournit la traînée additionnelle qui, seule, peut ramener
la vitesse autour de 210 nœuds.
Maintenant que l’avion est contrôlé en tangage autour du vol horizontal
et que la vitesse est redevenue compatible avec un atterrissage, Eric
apprend à maîtriser la direction du vol.

Car l’explosion du missile a arraché une bonne partie de l’aile gauche,
entre le bord de fuite et l’âme du longeron arrière qui servait de
cloison au réservoir externe : 3500 kilos de carburant s’échappent
rapidement en s’enflammant.

Entre aile gauche et aile droite existe alors une double dissymétrie (de

forme et de masse) qui entraîne un « équilibre » en virage permanent à
gauche. Il faut bien en sortir pour revenir vers le terrain.

La manœuvre dissymétrique des manettes agit sur l’inclinaison. Quand le
moteur gauche est seul accéléré, les ailes reviennent vers
l’horizontale, de même si le moteur droit seul est réduit, mais ce n’est

pas si facile :
- si la réponse aux variations de poussée apparaît rapide en tangage,
la réponse en roulis est quelque peu décalée (le roulis résulte en fait
du dérapage induit par la dissymétrie de poussée et il faut le temps de
l’installer)
- comme l’aile gauche est endommagée, il faut trouver la dissymétrie de

poussée qui compense la dissymétrie de portance, et la maintenir pendant

les modulations de poussée qui contrôlent la pente. Plus facile à
dire qu’à faire !

Au total la situation est donc encore plus délicate que celle du DC 10
de Sioux City, car dans ce dernier cas la perte totale hydraulique
résultait de l’explosion du moteur central, et laissait certes la
difficulté de contrôler la pente et l’inclinaison par le pilotage des
seuls moteurs sous voilure, mais au moins à partir d’un avion dont les
ailes « portaient » symétriquement !

Toujours est-il qu’Eric apprend assez rapidement cette gymnastique
particulière des manettes de gaz et, après quelques excursions un peu
inquiétantes de l’inclinaison au-delà de 30°, le moral remonte.
Maintenant il peut envisager de « naviguer » vers le terrain qu’il a
perdu de vue dans ses évolutions d’apprentissage.
Steve prend en charge la navigation. Il faut une longue finale, au moins

20 nautiques. Après un deuxième virage de 360° par la gauche, suivi d’un

segment rectiligne d’éloignement, Eric engage un virage à droite pour
revenir vers la 33 R, la plus longue des deux pistes de Bagdad.
Il faut maintenant établir le plan de descente. Là aussi ce n’est pas
commode : La pente affichée par la valeur moyenne de la poussée n’est
pas simple à interpréter, car tout se passe dans l’oscillation phugoïde.

C’est donc une pente moyenne qu’il faut visualiser tout en maintenant
la direction par le jeu dissymétrique des moteurs : pas évident quand
l’assiette varie entre O ° et 5° avec une période proche de la minute !

Comme un bonheur ne vient jamais seul, la turbulence associée à un vent
de 20 nœuds du 290° (composante travers gauche) excite les oscillations
naturelles et pour faire bonne mesure les alarmes GPWS retentissent à
répétition.

L’alignement est difficile, Eric adapte alors ses ambitions à la
faiblesse des moyens dont il dispose :

- La piste 33 L semble plus près du cap moyen, va pour la
gauche.
- La pente moyenne semble faible, tant pis si on touche avant la piste
Il se concentre sur l’essentiel, garder un avion sous contrôle et
rejoindre le terrain, là où il y a des pompiers pour maîtriser le feu de

l’aile gauche.

Steve aide par ses commentaires efficaces, annonce distances et
altitudes. Il rappelle qu’il ne faut pas réduire à fond les deux
moteurs, sinon la poussée symétrisée au ralenti induirait un virage à
gauche particulièrement indésirable dans les derniers pieds avant le
contact avec le sol.

Mario surveille le carburant dans l’aile gauche endommagée. Il est vital

que le moteur gauche reste en fonctionnement.

Il se tient donc prêt à ouvrir l’intercommunication si le réservoir 1 se

vide à son tour, mais pas trop tôt, car on soumettrait alors le
carburant contenu dans l’aile droite à la fuite du côté gauche !

La tension remonte avec la décroissance de l’altitude. A 250 pieds
l’assiette longitudinale, toujours lentement oscillante, glisse vers les

valeurs négatives ce qui est très inquiétant si près du sol. Elle est
relancée vers le cabré par une remise de gaz franche sur les deux
moteurs.

Vers 100 pieds, l’avion pointe vers l’entrée de piste, mais avec un cap

inférieur de 10° à l’orientation de la 33. Eric commande alors sa
dernière correction de contrôle latéral, en réduisant le moteur droit
seulement. L’avion s’incline vers la droite, et l’angle de divergence
commence à diminuer, mais grâce à la poussée élevée maintenue sur le
moteur gauche, l’avion ne plonge pas vers le sol dans les derniers
pieds.

Vingt cinq longues minutes après l’impact du missile, l’A 300 a donc bel

et bien été posé sur la piste 33 L et intact :

- Avec une assiette longitudinale positive,
- Une vitesse verticale modérée (inférieure en tous cas aux 10 pieds par

seconde pour lequel le train est calculé !)
- Une inclinaison de 10° à droite et un cap divergent sur la gauche de
l’axe de la piste d’environ 8°

Sans aucune énergie hydraulique, C’est une « première » et un véritable
exploit.

Toujours privé de moyen direct de contrôle de la direction, l’avion
quitte ensuite la piste très rapidement.
Les moteurs sont maintenant réduits et passés en pleine reverse. Le sol
sablonneux fournit un complément non négligeable au freinage.

Au total, ce freinage est performant (près de 0.5 g de décélération) et,

en dépit de la vitesse élevée au touché, l’avion s’immobilise après
une course de l’ordre du kilomètre, soulevant derrière lui un panache de

sable impressionnant.

L’avion est finalement stoppé le nez dans la clôture de l’aéroport. Il
ne reste plus qu’à quitter le bord par le toboggan droit … et poser pour

la photo souvenir.

===8<===========End of original message text===========