Emotions et nuages (1)

[*Aquila*]

Un vent d’hiver a soufflé dans nos cœurs en ce sinistre jour d’été. Entrée dans la légende à peine huit ans plus tôt, elle avait donc déjà pris son ultime envol. C’est bien son ombre, hélas, qui, en ce triste jour, voila l’astre solaire, nous plongeant dans l’effroi. En chacun de nous gronda une vaine révolte : de celles qu’inspirent les trépas qu’on dit prématurés. Mais aussi les souffrances que nous voyons s’abattre sur ceux que le destin se devrait d’épargner.

Un jour par an, le monde consacre à la femme une journée la célébrant. Les trois-cent-soixante quatre autres fois que la Terre fait le tour de nos nombrils, l’humanité masculine toute entière n’en a cure, mais la bonne conscience est sauve. C’est dans ce contexte un peu particulier que le pays des droits de l’Homme breveta sa première femme pilote de chasse… trois mois après qu’une éthiopienne fût la première à remporter une victoire sur avion à réaction.

Du réacteur à internet, du GSM au TGV, le monde aujourd’hui va si vite… Comment alors figer l’instant pour, au plus profond de soi, le garder en repère ? Elle y est parvenue, elle était pourtant vive ! Je garde en moi l’image : un sourire, un regard. La passion, un avion. Qu’elle fût brillante, excellente, là n’est pas l’essentiel. Non, ce qui doit importer, par delà même le vide, c’est ce qui reste et grandit, intègre, invulnérable même à la mort. Quand, dans un si vieux pays, on se trouve être la première, c’est qu’on a repoussé les bornes du possible, qu’on leur a imposé sa propre volonté.

Cette victoire-là, elle en fut l’artisan, mais elle nous l’a léguée, à nous qui survivons, hommes ou femmes, qu’importe. Si aujourd’hui, Madame, j’ai voulu vous écrire, c’est pour rendre un hommage à ceux de votre rang : les femmes et les hommes dont la vie s’est conclue en laissant derrière eux un monde un peu meilleur, produit de leurs vertus. Que ce si long voyage vous soit doux et heureux. Que votre dernier vol rejoigne en larges courbes majestueuses ceux d’Amelia Earhart, Jacqueline Auriol et d’autres, que je ne nommerai pas de peur d’en oublier.

[werner]

Vraiment un tres bel hommage, tres poetique et tres poignant.

Signe Werner, truffe qui regarde le ciel