Un vol d'automne ...
Publié : mar. oct. 11, 2005 4:38 pm
Voilà, un petit récit de mon dernier vol en date
En espérant que ca vous plaire ,
Heure de décollage - 90 minutes
06H30, il fait encore nuit... L'aérodrome de Mulhouse est encore endormi. En respirant profondément les odeurs d'herbes mouillées me chatouillent les narines. De nombreux souvenirs de mon enfance restent encore liés à ces odeurs . Seules les lumieres de l'autoroute, et les bruits des voitures me ramènent à notre époque.
Le vol d'aujourd'hui doit m'amener à Bonn... l'aéroport Adenauer exactement, EDDK de son petit nom. Avec mon "petit" zinc, un bonanza, je sais que ca ne sera pas gagné. L'aéroport est, de par sa taille et son traffic, à classer entre le Bourget et Orly.
La route prévue doit m'emmener de Mulhouse au VOR de Strasbourg (STR) ensuite la route R7 en survolant Grostenquin (GTQ), la ville du Luxembourg et le VOR de DIEKIRCH (DIK) le VOR d'Olno (LNO) et ensuite la R15 jusqu'à l'IAF NOR. Niveau de croisière prévu: FL120 . Le vol doit durer 1h40 , le dégagement retenu sera Dusseldorf (EDDL). Je n'aurai qu'un passager et le plein de carburant. La route déposée sur le plan de vol a été acceptée sans modifications; Je n'ai pas de slot pour le départ prévu à 0600Z soit 08h00 locale. Ca me laisse une certaine latitude concernant l'heure de départ.
Sur le siège de la voiture, je retrouve le dossier météo et les derniers notams. Les prévisions ne sont pas brillantes pour le départ. L'aérodrome de Mulhouse n'a pas de procédures IFR, je dois donc prévoir un départ VFR et maintenir les conditions VMC jusqu'à la reception de ma clairance IFR.
Le terrain est situé en bordure d'une belle et grande forêt, avec les pressions actuelles et l'humidité ambiante, les prévisions de visibilité horizontale et de plafond sont médiocres... 1000m de visibilité , stratus entre 100 et 200 ft/sol.
A l'heure de mon arrivée , le terrain était exempt de brume... tout au juste de fins stratus s'étiraient au dessus des arbres... Mouais, l'heure de décollage prévue est encore loin, et mon passager n'est pas encore là...Le soleil commence à dévoiler ses rayons. Les minutes passent, et la visibilité tombe. J'ai l'impression que la foret "crache" du brouillard. Le terrain est devenu invisible en 10 minutes.
"aie".... Pas grand chose à faire à part attendre et prendre son mal en patience. N'ayant pas de slot, mon plan de vol est valable 30 minutes après 0600Z. Et mon passager qui n'arrive toujours pas....
Bon, j'en profite pour revoir les détails du vol: fréquences , quantitée fuel mini, consommation, points tournant, terrains de dégagement en route. Dans les notams, rien de particulier pour EDDK, les ILS sont fonctionnels , tant mieux ! Des taxiways seront fermés à Dusseldorf.
J'entends une grosse voiture qui approche... des faisceaux de phares convergent vers moi, mon passager vient enfin à "l'enregistrement".
"Bon , on y va ? " -- "Euh, je crois qu'il faut faire le plein..." . Il ouvre le hangar, on sort la bête. A la fois placide et brutal, le nez du bonanza rejoint l'air libre.
Les pleins sont faits. Les niveaux sont controlés. La visite pré-vol est effectuée.
Heure de décollage - 5 minutes
-"On peut y aller ? faut qu'on soit sur place avant 11h... "
-"non, on a pas les minima pour le décollage "
Heure de décollage + 2 minutes
Je décide de mettre en route, histoire de faire chauffer le moteur doucement, le turbo étant "assez" fragile sur ces types de moteurs turbocompressés. Je continue sur les essais moteur. Les parametres sont normaux.
Heure de décollage + 10 minutes
Soudain, la luminosité change, un trou de ciel bleu se dégage dans la trouée d'envol coté nord, la visibilité reste à environ 1500 m.
Rapide briefing décollage
-"Je remonte la piste 02 pour un décollage face au nord, Masse 1500kg , volet 0° anti-ice 1 Rotation 70kt, si panne avant Vr j'execute un arret-décollage, si panne mineur après Vr, on continue VMC, et on dégage sur Bale-Mulhouse, si panne moteur : atterrissage d'urgence dans le prolongement de la piste en évitant les obstacles, Vitesse d'évolution 95kt.
Trajectoire : montée dans l'axe 1300ft, ensuite avec Bale App pour la clairance , des questions ? Ok Briefing décollage terminé "
QFU piste /Compas+Gyro verifiés, phare on et transpondeur 7000 ALT
Chose assez étrange, durant ce backtrack , je remarque que la moitiée de la piste est baignée dans le brouillard. Tout le coté sud est bouché , jusqu'au seuil de la piste 02.
Heure de décollage + 13 minutes
Devant nous, une fenêtre météo, autant au sens propre qu'au sens figuré, s'est ouverte.... Je mets la puissance décollage, je lache les freins. On laisse derriere nous le brouillard qui envahi peu à peu la piste.
La puissance décollage est disponible (comme si on pouvait ne pas sentir le coup de pied au c*** !) et les parametres moteur sont au vert , pas d'alarme.
Le badin est actif.
"70 kt V1, Vr Rotation !"
Les 300 chevaux du "Flat-six" arrachent les 1500kg du Bonanza.
"Positive climb, Alti confirm, Gears up "
Réduction de la puissance et affichage des parametres de montée normale.
"Checklist après décollage: Train rentré, volet 0° , parametres moteur ok, puissance moteur affichée, altimetres au QNH comparés... C/L après décollage terminée"
-"Bale Approche, F-GPUB avec l'information Juliet , bonjour !"
Bale app : " F-UB, bonjour"
-"F-UB, un BE36TC au décollage de Mulhouse-Habsheim, transpondeur 7000, on passe 1300 ft en montée pour activer notre plan de vol IFR"
Bale app :" z'etes Identifié F-UB, vous etes maintenant sous plan de vol IFR, transpondez 6532 et joignez HO au niveau 120"
C'est toujours avec un soulagement profond que je collationne la clairance. Nous pouvons donc laisser en dessous de nous les stratus et le brouillard, nous prenons de l'altitude.
Le contrôle de Bale me transfère avec celui de Strasbourg alors que je passe à la verticale de la ville de Colmar
J'accroche le FL120 à 15 nm de STR. Le soleil diffuse une lumière dorée dans le cockpit. Je refais mes controles d'estimées et de carburant.
Je relève le nez de ma tablette, je vois un A320 d'AF qui passe au loin. Je peux voir son fuselage briller dans ce ciel limpide. Lui et moi nous n'avons pas les memes préoccupations à cet instant. Néanmoins, je ne peux m'empecher de les envier.
Je reviens dans mon bonanza quelques milliers de pieds plus bas. Le soleil chauffe mon visage, l'avion est sur sa route, je suis au paradis.
To be continued....
En espérant que ca vous plaire ,
Heure de décollage - 90 minutes
06H30, il fait encore nuit... L'aérodrome de Mulhouse est encore endormi. En respirant profondément les odeurs d'herbes mouillées me chatouillent les narines. De nombreux souvenirs de mon enfance restent encore liés à ces odeurs . Seules les lumieres de l'autoroute, et les bruits des voitures me ramènent à notre époque.
Le vol d'aujourd'hui doit m'amener à Bonn... l'aéroport Adenauer exactement, EDDK de son petit nom. Avec mon "petit" zinc, un bonanza, je sais que ca ne sera pas gagné. L'aéroport est, de par sa taille et son traffic, à classer entre le Bourget et Orly.
La route prévue doit m'emmener de Mulhouse au VOR de Strasbourg (STR) ensuite la route R7 en survolant Grostenquin (GTQ), la ville du Luxembourg et le VOR de DIEKIRCH (DIK) le VOR d'Olno (LNO) et ensuite la R15 jusqu'à l'IAF NOR. Niveau de croisière prévu: FL120 . Le vol doit durer 1h40 , le dégagement retenu sera Dusseldorf (EDDL). Je n'aurai qu'un passager et le plein de carburant. La route déposée sur le plan de vol a été acceptée sans modifications; Je n'ai pas de slot pour le départ prévu à 0600Z soit 08h00 locale. Ca me laisse une certaine latitude concernant l'heure de départ.
Sur le siège de la voiture, je retrouve le dossier météo et les derniers notams. Les prévisions ne sont pas brillantes pour le départ. L'aérodrome de Mulhouse n'a pas de procédures IFR, je dois donc prévoir un départ VFR et maintenir les conditions VMC jusqu'à la reception de ma clairance IFR.
Le terrain est situé en bordure d'une belle et grande forêt, avec les pressions actuelles et l'humidité ambiante, les prévisions de visibilité horizontale et de plafond sont médiocres... 1000m de visibilité , stratus entre 100 et 200 ft/sol.
A l'heure de mon arrivée , le terrain était exempt de brume... tout au juste de fins stratus s'étiraient au dessus des arbres... Mouais, l'heure de décollage prévue est encore loin, et mon passager n'est pas encore là...Le soleil commence à dévoiler ses rayons. Les minutes passent, et la visibilité tombe. J'ai l'impression que la foret "crache" du brouillard. Le terrain est devenu invisible en 10 minutes.
"aie".... Pas grand chose à faire à part attendre et prendre son mal en patience. N'ayant pas de slot, mon plan de vol est valable 30 minutes après 0600Z. Et mon passager qui n'arrive toujours pas....
Bon, j'en profite pour revoir les détails du vol: fréquences , quantitée fuel mini, consommation, points tournant, terrains de dégagement en route. Dans les notams, rien de particulier pour EDDK, les ILS sont fonctionnels , tant mieux ! Des taxiways seront fermés à Dusseldorf.
J'entends une grosse voiture qui approche... des faisceaux de phares convergent vers moi, mon passager vient enfin à "l'enregistrement".
"Bon , on y va ? " -- "Euh, je crois qu'il faut faire le plein..." . Il ouvre le hangar, on sort la bête. A la fois placide et brutal, le nez du bonanza rejoint l'air libre.
Les pleins sont faits. Les niveaux sont controlés. La visite pré-vol est effectuée.
Heure de décollage - 5 minutes
-"On peut y aller ? faut qu'on soit sur place avant 11h... "
-"non, on a pas les minima pour le décollage "
Heure de décollage + 2 minutes
Je décide de mettre en route, histoire de faire chauffer le moteur doucement, le turbo étant "assez" fragile sur ces types de moteurs turbocompressés. Je continue sur les essais moteur. Les parametres sont normaux.
Heure de décollage + 10 minutes
Soudain, la luminosité change, un trou de ciel bleu se dégage dans la trouée d'envol coté nord, la visibilité reste à environ 1500 m.
Rapide briefing décollage
-"Je remonte la piste 02 pour un décollage face au nord, Masse 1500kg , volet 0° anti-ice 1 Rotation 70kt, si panne avant Vr j'execute un arret-décollage, si panne mineur après Vr, on continue VMC, et on dégage sur Bale-Mulhouse, si panne moteur : atterrissage d'urgence dans le prolongement de la piste en évitant les obstacles, Vitesse d'évolution 95kt.
Trajectoire : montée dans l'axe 1300ft, ensuite avec Bale App pour la clairance , des questions ? Ok Briefing décollage terminé "
QFU piste /Compas+Gyro verifiés, phare on et transpondeur 7000 ALT
Chose assez étrange, durant ce backtrack , je remarque que la moitiée de la piste est baignée dans le brouillard. Tout le coté sud est bouché , jusqu'au seuil de la piste 02.
Heure de décollage + 13 minutes
Devant nous, une fenêtre météo, autant au sens propre qu'au sens figuré, s'est ouverte.... Je mets la puissance décollage, je lache les freins. On laisse derriere nous le brouillard qui envahi peu à peu la piste.
La puissance décollage est disponible (comme si on pouvait ne pas sentir le coup de pied au c*** !) et les parametres moteur sont au vert , pas d'alarme.
Le badin est actif.
"70 kt V1, Vr Rotation !"
Les 300 chevaux du "Flat-six" arrachent les 1500kg du Bonanza.
"Positive climb, Alti confirm, Gears up "
Réduction de la puissance et affichage des parametres de montée normale.
"Checklist après décollage: Train rentré, volet 0° , parametres moteur ok, puissance moteur affichée, altimetres au QNH comparés... C/L après décollage terminée"
-"Bale Approche, F-GPUB avec l'information Juliet , bonjour !"
Bale app : " F-UB, bonjour"
-"F-UB, un BE36TC au décollage de Mulhouse-Habsheim, transpondeur 7000, on passe 1300 ft en montée pour activer notre plan de vol IFR"
Bale app :" z'etes Identifié F-UB, vous etes maintenant sous plan de vol IFR, transpondez 6532 et joignez HO au niveau 120"
C'est toujours avec un soulagement profond que je collationne la clairance. Nous pouvons donc laisser en dessous de nous les stratus et le brouillard, nous prenons de l'altitude.
Le contrôle de Bale me transfère avec celui de Strasbourg alors que je passe à la verticale de la ville de Colmar
J'accroche le FL120 à 15 nm de STR. Le soleil diffuse une lumière dorée dans le cockpit. Je refais mes controles d'estimées et de carburant.
Je relève le nez de ma tablette, je vois un A320 d'AF qui passe au loin. Je peux voir son fuselage briller dans ce ciel limpide. Lui et moi nous n'avons pas les memes préoccupations à cet instant. Néanmoins, je ne peux m'empecher de les envier.
Je reviens dans mon bonanza quelques milliers de pieds plus bas. Le soleil chauffe mon visage, l'avion est sur sa route, je suis au paradis.
To be continued....